dimanche, juillet 08, 2007

L’imparfait de l’indicatif

a) Valeur générale

L’imparfait montre un fait en train de se dérouler dans une portion du passé, mais sans faire voir le début ni la fin du fait:
« Comme le soir tombait, l’homme sombre arriva. » (Hugo)

Etant donné cette valeur générale, l’imparfait convient bien pour des faits qui se répètent:
« S’il voyait un ivrogne chanceler et choir, il le relevait et le réprimandait. » (A. France)

b) Emplois particuliers

1. Certains faits de peu antérieurs ou postérieurs à un fait passé sont présentés comme simultanés par rapport à ce dernier fait. Le verbe a l’imparfait est généralement accompagné d’un complément de temps:
Nous sortions à peine qu’un orage éclata.
Je repris courage: dans deux heures du renfort arrivait.

2. On met aussi à l’imparfait un fait qui devait être la conséquence inévitable d’un autre fait (qui ne s’est pas produit). L’imparfait équivaut ici à un conditionnel passé:
« Elle mit la main sur le loquet. Un pas de plus, elle était dans la rue. » (Hugo)
« Sans moi, vous laissiez éteindre le feu! » (R. Martin du Gard)

Remarque
1. Avec les verbes marquant une idée d’obligation, de possibilité, de convenance ou quelque idée analogue (devoir, falloir, pouvoir, etc.), l’imparfait peut exprimer un fait qui devait ou qui pouvait avoir lieu à un moment déterminé du passé, mais qui ne s’est pas accompli. Dans cet emploi encore, il se substitue à un conditionnel passé pour exprimer la certitude:
Je devais le prévoir! (= j’aurais dû...).
Il fallait (= il aurait fallu) me faire part de vos projets: je vous aurais appuyé.

2. L’imparfait narratif ou historique, au contraire de la valeur fondamentale, marque un fait qui a eu lieu à un moment précis du passé (indiqué par un complément de temps):
« Tout changeait à cinq heures par l’arrivée de Desaix. » (Bainville)
« Une demi-heure plus tard, [...] il se déshabillait pour se mettre au lit. » (J. Green)

Cet emploi est appelé l’imparfait pittoresque, de rupture, de clôture.

3. L’imparfait d’atténuation concerne un fait présent que l’on rejette en quelque sorte dans le pasé, pour ne pas heurter l’interlocuteur. Il s’emploie surtout avec quelques verbes introduisant un infinitif et jouant le rôle de semi-auxiliaire:
« Bonjour, monsieur. Je venais voir si vous aviez réfléchi. » (J. Romains)
« Ecoute, Caroline, avant que tu me quittes, je voulais te demander quelque chose. » (Fr. Mauriac)

4. L’imparfait s’emploie obligatoirement après le si conditionnel pour marquer un fait hypothétique présent ou futur (le verbe principal étant au conditionnel présent):
Si j’avais de l’argent (aujourd’hui, demain), je vous en donnerais.

5. Limité à un type particulier de communication, l’imparfait hypocoristique ou mignard (avec transposition de personnes) exprime un fait présent, comme si on donnait à ce fait plus d’étendue en l’étirant dans le passé:
Comme il était sage! comme il aimait bien sa maman! dira une mère à son enfant.

Remarques
a.
Un autre emploi curieux est l’imparfait préludique, dont usent les enfants dans leurs propositions de jeu pour indiquer que les faits qu’ils imaginent sont déjà devenus comme réels et qu’ils continueront de l’être pendant la durée du jeu:
[Si on joue au docteur:] J’étais malade, et tu appelais le docteur.
[Si on joue au gendarme et au voleur:] Moi, j’étais le gendarme, et tu volais un vélo.

b. Le verbe d’une proposition peut être à l’imparfait (après un verbe principal au passé) alors qu’il exprime un fait qui dure encore au moment de la parole ou même qui est vrai dans tous les temps; l’esprit, par une sorte d’accommodation, considère la simultanéité du fait subordonné par rapport au fait principal:
« Je voyais bien que vous n’étiez pas un profane. » (Banville)
« Disons donc qu’il était louable que Tarrou et d’autres eussent choisi de démontrer que deux et deux faisaient quatre plutôt que le contraire. » (Camus)