lundi, septembre 25, 2006

Michel Tremblay, Les Belles-Sœurs (notes de lecture)





Publié chez Leméac, Québec, 1972.

Lecture de la pièce au Centre du Théâtre d’Aujourd’hui, en 1968. La pièce est créée le 28 août 1968 par le Théâtre du Rideau-Vert de Montreal.

Personnages

- Linda Lauzon, fille de Germaine;
- Germaine Lauzon, mère de Linda;
- Marie-Ange Brouillette;
- Rose Ouimet, sœur de Germaine;
- Lisette de Courval;
- Des-Neiges Verrette;
- Gabrielle Jodoin;
- Olivine Dubuc (dans une chaise roulante);
- Thérèse Dubuc;

Germaine gagne un million en timbres-primes. Elle invite ses sœurs et sa belle-sœur pour faire “un party de collage de timbres” (p. 16).

Marie-Ange Brouillette: “Ma vie est plate!” (p. 22)

Les cinq femmes: “J’me lève, pis j’prépare le déjeuner! Des toasts, du café, du bacon, des œufs. J’ai d’la misère que l’yable a réveiller mon monde. Les enfants partent pour l’école, mon mari s’en va travailler. […] Là, là, j’travaille comme une enragée, jusqu’à midi. J’lave. Les robes, les jupes, les bas, les chandails, les pantalons, les canneçons, les brassières, tout y passe! Pis frotte, pis tord, pis refrotte, pis rince… C’t’écœurant, j’ai les mains rouges, j’t’écœurée. J’sacre. A midi, les enfants reviennent. Ça mange comme des cochons, ça revire la maison à l’envers, pis ça repart! L’après-midi, j’étends. Ça, c’est mortel! J’hais ça comme une bonne! Après, j’prépare le souper. Le monde reviennent, y’ont l’air bête, on se chicane! Pis le soir, on regarde la télévision! Mardi!” (p. 23)

Résumé: “J’travaille, j’travaille, j’travaille.” (p. 24)

Refrain: “Pis le soir, on regarde la télévision!” (p. 24)

Gabrielle Jodoin: “Jaser, jaser, c’est beau…” (p. 26)

Sur les Îles Canaries: “C’est un ben… bien beau pays. Les femmes portent seulement que des jupes.” Réplique de Rose Ouimet: “Le vrai pays pour mon mari!” (p. 27)

Lisette de Courval: “D’ailleurs, en Urope, le monde se lavent pas!” (p. 27)

Tout un bavardage…

Autre refrain, émis par Yvette Longpré: “Pis, avez-vous déjà gagné quequ’chose, toujours?” (p. 44)

Thérèse Dubuc flanque un coup de poing sur la tête de sa belle-mère: “Ben non, ben non, est habituée. Pis c’est le seul moyen d’la tranquilliser. C’est mon mari qui a découvert ça! On dirait que quand on y donne un bon coup de poing sur la tête, ça la paralyse pour quequ’menutes… A reste dans son coin pis on est tranquille…” (p. 45)

Blague cochonne: “C’t’ait une religieuse qui s’était fait violer dans une ruelle… […] Ça fait que le lendemain, on la retrouve dans le fond d’une cour, tout éfouerrée, la robe r’montée par-dessus la tête… A gémissait sans bon sens, vous comprenez… Ça fait qu’y’a un journaliste qui s’approche pis qui y demande: «Pourriez-vous, ma sœur, nous donner quelques impressions sur la chose horrible qui vient de vous arriver?» Ça fait que la sœur ouvre les yeux pis murmure: «Encore! Encore!»” (p. 50)

Lisette de Courval: “On se croirait dans une basse-cour! Léopold m’avait dit de ne pas venir ici, aussi! Ces gens-là sont pus de notre monde! Je regrette assez d’être venue! Quand on a connu la vie de transatlantique pis qu’on se retrouve ici, ce n’est pas des farces! J’me revois, là, étendue sur une chaise longue, un bon livre de Magali sur les genoux… Pis le lieutenant qui me faisait de l’œil… Mon mari disait que non, mais y’avait pas tout vu! Une bien belle pièce d’homme! J’aurais peut-être dû l’encourager un peu plus… Puis l’Urope! Le monde sont donc bien élevé par là! Sont bien plus polis qu’ici! On en rencontre pas des Germaine Lauzon, par là! Y’a juste du grand monde! A Paris, tout le monde perle bien, c’est du vrai français partout… C’est pas comme icitte… J’les méprise toutes! Je ne remettrai jamais les pieds ici! Léopold avait raison, c’monde-là, c’est du monde cheap, y faut pas les fréquenter, y faut même pas en parler, y faut les cacher! Y savent pas vivre! Nous autres on est sortis de là, pis on devrait pus jamais revenir! Mon Dieu que j’ai donc honte d’eux-autres!” (p. 59)

Les personnages de Michel Tremblay sont mesquins, ignares, matérialistes, grincheux, méchants, bavardeurs, bornés. Leur monde est écœrant. Il n’y a pas d’espoir, soif celui de voir leur « qualités » monstrueuses pousser vers le superlatif absolu.
Encore!

lundi, septembre 18, 2006

Tahar Ben Jelloun, L’homme rompu (notes de lecture)





Paru chez Editions du Seuil, janvier 1994. Le roman se veut un soutien pour l’écrivain indonésien Pramoedya Ananta Toer, un hommage pour son roman Corruption.

Le personnage principal, Mourad, est ingénieur, il étudie les dossiers de construction. Son titre: “sous-directeur de la planification, de la prospective et du progrès” (p. 11). Il a des problèmes d’argent, il ne s’en sort pas.

Le nom de sa femme est Hlima.

Situation financière de Mourad: “Avec son salaire modeste il fait vivre sa famille, paye la scolarité des enfants, le loyer de la maison et subvient aux besoins de sa mère. Il n’y arrive pas. Il vit à crédit grâce à l’épicier. Il sait qu’il ne pourra pas avoir un troisième enfant.” (p. 11)

Son adjoint, Haj Hamid, gagne moins que Mourad, mais se permet beaucoup plus. Mourad le déteste. “Il est ennuyeux, fat et vaniteux.” (p. 14)

Le propre de la corruption c’est qu’elle n’est pas visible directement.” (p. 14)

Haj Hamid – “adjoint visqueux” (p. 15)

Les chaouchs aiment bien Haj Hamid. Il est généreux, disert, attentionné. Il est au courant de leurs problèmes, les aide, leur donne ses vieux habits, pense à leurs enfants au moment des fêtes. C’est un homme bon. Le vendredi, il quitte le bureau à 11 heures pour aller à la mosquée. Ce jour-là, il vient tout habillé de blanc; djellaba, chemise, seroual, babouches, tous blancs. Après la prière, il va déjeuner et revient au bureau avec une bonne demi-heure de retard.” (p. 15)

Mourad est un homme tranquille. Tout ce qu’il cherche, c’est assurer avec dignité l’avenir de ses enfants. Il est prêt à tous les sacrifices mais pas à violer ses principes et faire comme les autres.” (p. 17)

La tentation, quand M. Foulane lui avait offert une liasse de billets de banque. “Avec un million, il achèterait une mobylette, une robe à Hlima, et un costume de fête à chacun des enfants, ils iraient tous au restaurant manger du poisson, il fumerait des cigarettes américaines et peut-être il s’offrirait un cigare Monte Cristo no 1 spécial qui coûte quatre-vingts dirhams, le prix de deux repas en temps normal. Il sufissait d’une signature, une petite signature en bas d’une page.” (p. 17)

Mourad préfère dire: “Je ne suis pas corruptible.” (p. 17), après avoir craché par terre.

Préssion de la part de la famille de sa femme: “Son père ne dit rien. Il apprécie Mourad, il connaît son sérieux et son honnêteté. La mère est hypocrite. Elle lui fait de grands sourires mais dès qu’il a le dos tourné elle se moque de lui. Elle le trouve petit, pauvre et terne et ne rate jamais l’occasion de lui envoyer quelques vannes du genre: «Sidi Larbi change de voiture, je pourrais intervenir auprès de ma fille pour qu’elle lui parle et vous la vende à un prix intéressant… Ça doit coûter quoi? Cinq, six millions, c’est rien aujourd’hui!»” (p. 18)

Pour son entourage, Mourad est un type qui n’a pas su s’adapter à la vie moderne. “S’adapter c’est quoi? C’est faire comme les autres, fermer les yeux quand il le faut, mettre de côté ses principes et ses idéaux, ne pas empêcher que la machine tourne, bref c’est apprendre à voler et en faire profiter les autres.” (p. 19)

Identité: “Je sais que ce qu’ils appellent «la machine» ne marche pas avec des gens comme moi. Je suis le grain de sable qui s’y introduit et la fait grincer. J’avoue aimer ce rôle. Il est unique, rare et nécessaire.” (p. 19)

Sur la vie: “Bien sûr, tout cela se passe de manière déguisée, voilée, indirecte, jamais de façon frontale.” (p. 20)

Sa tristesse: les cris de sa femme, qui ne comprend pas la situation.

Il existe un manuel d’érotologie musulmane, celui du cheikh Nafzaoui. Il décrit 29 positions pour faire l’amour.

Sa femme lui dit, quand il refuse de la sodomiser: “Tu n’est pas un homme!” (p. 25). “[…] je me sentis ridicule et compris qu’avec cette injure et surtout mon absence de réaction ma vie allait petit à petit se transformer en quelque chose qui n’allait pas tarder à ressembler à l’enfer.” (p. 25)

Il pense à sa cousine, Najia, qu’il aurait pu aimer.

Quand il se fait embauché par le ministère de l’Equipement, sa femme lui dit de toucher un comission pour chaque dossier analysé. A son refus, elle lui dit la deuxième fois qu’il n’est pas un homme (mise en doute de l’identité). Puis elle commence à lui jeter des objet à la figure. Sa réaction: “Pour l’arrêter dans son hystérie et la calmer, je la considérai comme un incendie, je me précipitai à la salle de bains, remplis un seau d’eau et le vidai sur elle.” (p. 27)

Identité: “Cependant, face aux corrupteurs, je n’ai jamais été timide. Toute ma fierté est là. Ma résistance a toujours été sans faille. Le fait de me trouver face à face avec un homme qui essaie de m’acheter me donnait force et courage. Je ne lui faisais pas de leçon de morale. Je me levais et le mettais à la porte de mon bureau sans dire un mot. L’homme partait à reculons et moi, sans perdre mon sang-froid, je me rasseyais et poursuivais mon travail. Ce fut ainsi que j’acquis la réputation de «l’homme de fer». Mais pour les autres j’étais «Grain de sable».” (p. 28)

Encore: “Ni l’homme de fer, ni grain de sable. Mais simplement un homme honnête.” (p. 29)

Perspectives identitaires: “Pour les gens modestes, je n’étais ni de fer ni de sable. Pour eux, j’étais un saint. C’est ce que me dit un jour un jeune médecin qui venait d’être nommé au grand hôpital public de la ville. C’était un homme encore plus naif que moi.” (p. 29)

La corruption = grasser la patte, glisser l’enveloppe.

Son chef lui dit: “La rigueur est nécessaire, surtout dans notre pays, mais un peu de souplesse ne fait pas de mal.” (p. 32)

Son chef lui tient un discours sur “la souplesse”.

Avec ma femme aussi je suis intègre. Ce n’est pas l’envie qui me manque, mais j’ai des principes et je tiens à les respecter.” (p. 38)

Ce qui annonce les transformations est exactement l’importance accordée à l’argent: “Je me suis arrêté au bar Alhambra et j’ai bu une bière, 15 dh, je me suis fait cirer les chaussures tout en buvant, c’est un petit luxe qui m’a coûté 5 dh, j’ai fumé deux cigarettes dont une Marlboro achetée au détail chez les gamins qui rôdent autour des cafés. Qu’est-ce qu’on va manger ce soir? Une soupe de légumes et un peu de fromage hollandais. C’est léger et pas très coûteux.” (p. 39)

L’argent rend heureuse sa femme.

Les enfants: Wassit et Karima.

Moments de la découverte identitaire: “[…] j’ai appris qu’on découvre vraiment les êtres dans des moments inattendus comme les silences, ou grâce à un petit détail, dans la manière dont ils réagissent à des faits sans importance.” (p. 41)

Dans l’esprit de Mourad, tout passe par l’argent: “Un homme qui est fauché à partir du 20 [du mois – n.n.] ne doit pas penser à une autre femme. Il faut chasser de mon esprit l’image de Najia.” (p. 42)

Premier pas, l’inquiétude: “Comment font tous les autres? Pourquoi moi je tremble, j’ai des sueurs froides rien qu’à l’idée d’envisager un arrengement somme toute banal et courant?” (p. 43-44)

Son ami, Abbas, est riche est modeste.

Saddam a lancé sur le village Halabja, d’habitants kurdes, des gas toxiques. Une chose semblable a été faite par le syrien Hafez el Assad.

Le tunnel: “Je ne sais pas pourquoi, mais des gens comme moi sont condamnés à circuler dans un tunnel. Je suis sans recours. Il suffit que j’emprunte un chemin pour qu’il se creuse et se transforme en tunnel, et souvent au bout il y a un puits.” (p. 47)

Au fond de mon tunnel, je ne cesse de faire des calculs.” (p. 48)

Le thème de son changement identitaire est la souplesse. Le direction: “Tout est dans l’apparence.” (p. 53) Changer la vie.

Une voix lui parle. C’est la voix de sa mauvaise conscience.

Une enveloppe lui est dédié dans un dossier à étudier. Sans nom, mais il sait très bien que c’est pour lui: “Je suis tenté de vider l’enveloppe. Si je le fais, je ne pourrai plus revenir en arrière. Ce sera le début de l’engrenage. Ma vie sera changée. Il y aura un avant l’enveloppe et un après.” (p. 63) – un seul geste peut entraîner le changement identitaire.

Je sens que je suis conquis par la souplesse. Je la compare à un sofa moelleux où le corps s’enfonce doucement. Je me laisse aller, la tête en arrière, je ne vois plus le monde tel qu’il est, je ne sens plus mes muscles, je suis ailleurs, sur un voilier en Méditerrannée, les yeux fermés, le visage légèrement caressé par la brise, je suis heureux.” (p. 65)

Karima, sa fille, a une nouvelle crise d’asthme. Il lui faut des médicaments et changer le climat.

Mourad a le ventre noué, la gorge sèche et les mains qui tremblent avant de prendre la décision.

Le moment juste après la signature du dossier Sabbane (en arabe: celui qui lave le linge sale): “Je pousse un grand soupir de soulagement. C’est simple, rapide et sans drame. J’étais fou de m’encombrer de tant de scrupules. J’ai franchi le pas. Je ne suis plus le même, je vais même devenir meilleur.” (p. 71)

L’argent provenu de la corruption, Mourad se propose de le plaquer dans L’Etre et le Néant, le livre de J.-P. Sartre.

Il écrit dans son bloc-notes: “A partir de ce jour, je décide de changer.” (p. 74). Mais le changement était déja fait. Programme de changement: changer de style d’habits (costumes amples et belles chaussures); cesser de fumer au Ramadan; ne plus regarder la télévision; passer plus de week-end à la maison; acheter une voiture; manger lentement; faire du sport; tenir un journal; acheter un coffre pour cacher l’argent qui “tombera du ciel” (p. 75); parler a Najia.

Une journée plus tard: “J’ai l’impression que la journée d’hier est très loin. D’un coup, je suis devenu corrompu, j’ai découvert le luxe et j’ai presque trompé ma femme. Tous ces bouleversements en si peu de temps! Il y a de quoi perdre l’équilibre. J’ai justement le vertige.” (p. 82)

Questionnement: “Un homme corrompu est-il un homme libre? C’est paradoxal. L’argent sale donne des ailes. Mais que vaut cette liberté?” (p. 86)

L’excursion avec Karima, sa fille.

Sa vie n’est plus sa vie: “Pendant ce temps-là passe à la télé un feuilleton égyptien où une femme abandonnée crie de toutes ses forces. Je ne sais plus si je suis chez moi ou dans ce film. […] Je vois ce foyer qui ne me ressemble plus, ces meubles, ces tissus de canapé, ces portraits sur le mur, je contemple le désordre et me sens de plus en plus étranger.” (p. 96)

Cause du changement: “La religion de l’argent pourrit tout ce qu’elle touche. Elle méprise les gens modestes, les honnêtes gens incapables de magouilles. Ce mépris, je l’ai porté sur ma peau longtemps. J’en étais même fier. […] J’ai resisté tant que j’ai pu…” (p. 97)

Le fils: “J’aime bien le mot arabe pour désigner la corruption; c’est ce qui est miné de l’intérieur, rongé par les mites, on dit cela du bois qui est foutu et qui ne sert plus à rien, pas même à faire du feu. L’homme c’est pareil. S’il vend son âme, s’il achète la consciences des autres, il participe à un processus de destruction générale.” (p. 98-99)

Il pense rendre l’argen à M. Sabbane, il a des crises de conscience: “Je me retrouve dans le tunnel. J’avance péniblement. […] La mauvaise conscience n’a qu’à continuer à travailler. C’est elle qui me jette dans le tunnel.” (p. 100)

Decision de changement identitaire: “Donc, à partir de demain matin à huit heures, j’entre dans la peau d’un fonctionnaire corrompu.” (p. 102-103)

Toujours des calculs: “En faisant un calcul rapide et approximatif, ça pourra m’assurer entre quarante mille et cinquante mille dirhams, presque six mois de salaire. A ce rythme, si on compte les congés, les jours fériés, les aléas de la crise, l’avarice de certains entrepreneurs, puis les quelques folies, j’en suis capable, tu verras – je peux tabler sur cinquante millions par ans. A ce rythme, seule ma mort arrêtera ce flot merveilleux, véritable trésor.” (p. 103)

La pauvreté est un défaut, c’est comme quelqu’un qui naît borgne ou bossu. C’est un défaut de la nature, va-t-on lui en vouloir?” (p. 108)

Après avoir avoué qu’il n’aime pas être poussé à prendre des décisions, il sent le désir de tergiverser, de réduire la vitesse des événements: “Laissons venir les choses. Attendons de voir. Pas d’agitation. Pas de décision prise à la légère. Penser, analyser, réfléchir calmement, sans se presser, en pesant les choses. Surtout pas de précipitation.” (p. 108)

Najia ne veut pas un homme corrompu. Elle est honnête. Mourad réfléchit: “C’est avec Najia que j’aurais dû faire ma vie. Elle ne m’aurait jamais poussé à la corruption. Je suis victime de ma faiblesse et de mes illusions.” (p. 111)

Changement en cours, quand une femme l’accoste dans la rue: “Elle n’a qu’à prendre ces dollars. Puis je me ressaisis. Non, cet argent m’appartient. J’ai mis plus de vingt ans pour le gagner.” (p. 112)

Troubles identitaires collectif: “Le cinéma égyptien de notre enfance était merveilleux. Les séries qui passent à présent à la télé sont horribles. C’est cela la décadence. Les comédiens hurlent au lieu de jouer. Ils participent à l’hystérie collective. D’ailleurs, de plus en plus de Marocains agissent et parlent comme leurs idoles égyptiennes. C’est de l’ordre de l’épidémie et de la contamination.” (p. 113)

La femme est une étudiante en médicine, Nadia. Elle est seule, elle le voit seul. Ils se parlent.

Après la corruption, il n’est plus capable d’arrêter la machine: “Ma tête est celle d’un pauvre type qui ne sait plus comment se retirer d’un engrenage qui va le broyer. Je vois d’ici la machine avancer sur un rythme régulier et sûr. Elle s’approche.” (p. 116)

Changement identitaire accompli: “Je suis devenu un homme souple. Je regrette les perturbations de ces dernières semaines. La vie me sourit.” (p. 120)

La réponse de Najia: “Après tout, c’est ta vie, tu en fais ce que tu veux. Ne me mêle pas à tes trafics. Tu seras toujours le bienvenu. Mais je refuse de toucher à l’argent sale. C’est le principe. Dans ce pays, il y a encore des personnes qui respectent des principes. Elles sont rares, mais elles existent et il ne faut pas les salir. D’ailleurs, si le pays marche, c’est en partie grâce à elles. Tous les Marocains ne sont pas corrompus.” (p. 122)

Je ne me sens pas bien. J’envie tous ceux qui volent, mentent, trahissent et sont en bonne santé.” (p. 134) Il arrive à la conclusion qu’il souffre du «syndrome du nouveau corrompu» (p. 135).

Le médecin lui dit qu’il est hyperémotif et timide.

C’est important, l’apparence. Chez nous l’habit fait le fqih! Enfin, pas toujours. Ici, on n’aime ni le naturel ni la simplicité. Il faut aller dans les campagnes pour rencontrer des gens encore attachés aux choses simples de la vie. Ils sont accueillants et généreux même s’ils sont pauvres. En ville, plus les gens sont riches plus ils sont calculateurs. Ma belle-mère a une calculatrice dans les yeux.” (p. 136)

Une tache blanche derrière l’oreille le fait penser à son foie.

L’inspection. Le déjeuner chez H.H.: “La villa de H.H. lui ressemble: mauvais goût à l’intérieur, signes extérieurs de nouveau riche.” (p. 144)

La nouvelle secrétaire, Doukkali, avait quitté son poste précédent parce que le patron voulait coucher avec elle. Elle a porté plainte contre lui pour harcèlement sexuel.

Il propose à Najia de l’épouser. Celle-ci accepte, à la seule condition qu’il arrête de toucher des comissions. Et qu’il divorce.

Les tâches blanches l’envahissent: “Je perds la couleur naturelle de ma peau au fur et à mesure que je consomme l'argent sale.” (p. 153) C’est vitiligo, trouble de la pigmentation. Pas grave. Le vitiligo est accompagné d’une allergie, une espèce de rejet. C’est psychosomatique.

Ce n’est qu’après deux ans de mariage que je me suis rendu compte que j’étais avec une femme névrosée. Elle s’accomode bien de ses problèmes psychiques dans la mesure où elle n’y attache pas beaucoup d’importance. Ses manies me gênaient, son indiférence, m’énervait, son obsession de l’argent et du confort matériel m’insupportait. Et pourtant, j’ai fait avec elle deux enfants et un bon bout de chemin. Tout cela est loin d’être logique. J’ai toujours pensé que les hommes sont lâches, surtout face aux femmes. J’ai perdu beaucoup de temps. Malheureusement, je me suis réveillé trop tard.” (p. 155-156)

Son bonheur est schizoïde: “Je rentre chez moi et je ne penserai à rien. Je me boucherai les oreilles avec des boules Quies, je prendrai un livre et m’endormirai en lisant. Je me mettrai dans un petit coin du salon ou je m’enfermerai dans la cuisine. Là j’aurai la paix. La liberté, ma liberté, c’est cela et pas plus. C’est étroit, c’est petit. Mais c’est ainsi.” (p. 158)

La belle-mère de Mourad lui rend une visite, pour médier la fin de la crise conjugale. Un cousin de sa femme réagit aussi en promettant son aide pour placer Karima dans une clinique privée.

A la banque, où il veut échanger des dollars, le fonctionnaire veut le faire payer un commission. Réflexion: “Je suis un homme corrompu; nouvellement corrompu mais qu’importent la date et la nature de la première bavure.” (p. 166) C’est comme une longue période avait déjà passé.

Changement identitaire et changement physiognomique: “J’arrive à voir mon image dans la vitre. Mon visage est un peu déformé. C’est la chaleur, l’angoisse et la peur. Ma tête n’a jamais été très belle, mais la mauvaise qualité du verre lui donne des proportions anormales.” (p. 167)

Comme les hommes dont on parle dans les livres, je suis arrivé à un endroit déterminé de ma vie et j’hésite entre lutter et me détruire.” (p. 171)

Mourad est accusé d’avoir volé et vendu une vieille machine à écrire (qui se trouvait en fait chez soi).

Changement identitaire chez Tajeddine, le fils de notre instituteur: “Parti de zéro, le voilà aujourd’hui à la tête d’une fortune. Il est devenu américain, pas dans les papiers, mais dans la tête. Il parle efficacité, rentabilité, rigueur, sérieux, aventure, risque, intégration… Il fait un portrait d’Américain qui me fait rire. Tous les clichés y sont.” (p. 179)

Intertextualité: “Je me sens étranger à tout. Etre étranger à soi est bien commode. Comme l’autre, je pourrais commettre un crime sous le soleil et je ne m’en porterais pas mal.” (p. 182)

La vieille machine à écrire est un prétexte pour le faire virer.

Résumé du roman: “J’ai résisté durant vingt ans, luttant seul et avec toutes mes forces contre la corruption et ses tentations. J’ai fait mener à ma famille une vie de pauvres. Nous en avons tous souffert mais notre conscience était tranquille. J’ai cédé deux fois. J’ai touché deux fois une commission. J’ai palpé l’argent sale et j’ai été envahi par des taches blanches. Aujourd’hui, ces taches ont tendance à disparaître. Cet argent m’a brûlé les doigts. Il a saccagé ma vie, détruit mes illusions, ravagé mon sommeil. Et voilà qu’on me poursuit pour une peccadille!” (p. 194)

Paradoxalement, une fois avoir renoncé à sa nature de “grain de sable”, une fois entré dans le système, il a peur de se faire broyer par la machine.

Mourad abandonne le calcul et la logique pour l’évasion onirique: “Longtemps j’ai voulu suivre l’ordre des choses. A présent et grâce à l’histoire Olivetti-Larousse, je fais davantage confiance au désordre et au rêve.” (p. 198)

Il cherche son réfuge aussi dans le passé: “Nous avons tous besoin d’une petite place sur la terrasse de l’enfance, là où on est hors d’atteinte, un peu comme si on était mort.” (p. 199)

L’aveu du changement identitaire: “La corruption a bouleversé ma vie; elle m’a fait connaître Nadia, m’a poussé dans les bras de ma cousine et m’a ouvert définitivement les yeux sur Hlima et son entourage. De quoi vais-je me plaindre?” (p. 206-207)

Y a-t-il vraiment un changement identitaire? “Si j’avais touché de grosses commissions je serais devenu un homme respectable. Mais, même corrompu, je suis resté petit. Or les petits, on les écrase.” (p. 207)

Tout s’avère un coup monté par H.H. et le directeur et puis démonté par eux aussi.
La phrase finale du roman, H.H. la fit à Mourad: “Bienvenue dans la tribu!” (p. 223)
Encore!

mercredi, septembre 13, 2006

Louky Bersianik, Le Pique-nique sur l’Acropole (notes de lecture)





Paru chez l’Hexagone, 1992.

Exergue de la préface: “… notre force présente vient paradoxalement de ce gigantesque trou de mémoire historique qui nous a faites longtemps invisibles et nous fait aujourd’hui terriblement vivantes. C’est-à-dire que notre émergence au lieu même de notre invisibilité est terrifiante. C’EST-À-DIRE QUE D’AVOIR ÉTÉ INVISIBLES SI LONGTEMPS NOUS DONNE UNE TAILLE DÉMESURÉE. C’est-à-dire que de voir bouger des statues géantes, de voir des Caryatides se mettre en mouvement en laissant s’effondrer les temples du patriarcat, c’est voir plus de VIE qu’on en ait jamais vu DE MÉMOIRE D’HOMME.” (Les agénésies du vieux monde, Louky Bersianik)

Dédicaces:
♥ à Françoise d’Eaubonne;
♥ à Luce Irigaray;
♥ à ma mère;
♥ à ses sept filles;
♥ aux femmes futures et du passé;
♥ aux femmes présentes et du présent.

Moto 1 de l’ouvrage: “La femme serait le support, l’espace d’inscription des représentants de l’inconscient «masculin». De «l’inconscient» du développement historique (de la sexualité). Pour elle, cette économie ne pourrait valoir que comme «préhistoire». Et si sa sexualité venait, un jour à être «reconnue», entrait dans «l’Histoire», celle-ci déjà n’aurait plus simplement lieu.” (Luce Irigaray)

Moto 2 de l’ouvrage: “Si le grand renversement du patriarcat n’est pas effectué, et très vite, c’est la fin de notre espèce.” (Françoise d’Eaubonne)

Avertissement: “Ami lecteur au masculin, ne soit pas offusqué si tu ne figures pas comme convive à notre pique-nique. Quand nous avons voulu t’inviter tu étais introuvable. Puis, nous avons appris que tu t’étais rendu au banquet de Platon. Bien que ce petit souper historique dût être terminé depuis longtemps, à l’aube de ce jour il dure encore! Avec un tel entraînement, nul doute que tu prendras avec philosophie ton absence sur les lieux de nos propres agapes.

Si quelque propos rapporté ici écorche tes oreilles platoniciennes, il faudra te convaincre qu’il ne peut s’agir là que d’une «blessure symbolique». Chose à laquelle on nous a bien habituées et qui ne nous a jamais fait mourir… Sauf innombrables et négligeables exceptions
.” (p. 22)

Exergue en majuscules: “Le pouvoir patriarcal repose sur l’interdit du corps maternel sur la supercherie symbolique de la paternité et sur la clitoridectomie réelle et psychologique” – intéressante l’utilisation du mot “réel”: devrions-nous comprendre que les seules choses réelles sont celles matérielles? Que les choses psychologiques sont irréelles?

Prélude. En (La) mineur(e) sur l’écriture

1. Le Chant des Statues Vives

Onirique? Langage laconique. Support pour d’autres.” (p. 27)

“Ecrire est une expression corporelle.” (p. 28)

IPHIGÉNIE “tuée par son père non par hasard au hasard des pages: «Père, père!» mais il est sourd” (p. 28)

CLYTEMNESTRE “tuée par son fils non par accident: «Ma mère cette étrangère».” (p. 28)

XANTHIPPE “a épousé le philosophe de la vérité, la pauvre cloche: «Qu’on l’emmène à la maison!»” (p. 28)

Picturalité de l’écriture (étonnament matérialiste, d’ailleurs): “L’agrégat des mots s’obtient donc par le mouvement de rupture du plan horizontal pour une ascension dans l’espace suivant une courbe géométrique extrêmement variée si l’on tient compte des accents, des barres, des points et des pointillés, exemple: les points de suspension qui ne suspendent absolument rien et qui ne sont que trois petits sauts en hauteur. Interruption de la course en faveur du saut plus prononcé, suspension relative: le coureur est suspendu à son propre souffle et produit l’espace blanc de la page. Solution de continuité donc. Elasticité du blanc après l’épreuve de la page blanc.” (p. 30)

Allusion aux amazones: “A la réflexion aussi, les seins ne gênent pas pour écrire. Je garderai donc mon sein droit.” (p. 32)

Blanc sur noir: “La mythologie peut être considérée comme la psychologie de l’histoire moderne.” (Phyllis Chesler) – (p. 34)

2. Les bouches d’aération

Tout est extrêmement matériel, charnel, anatomique: “Mon corps écrit comme un phagocute, pour se régénérer et par besoin de mots et d’un minimum d’exercice physique. Il a des histoires de femmes au fond du thorax, quelques-unes sont accrochées au sternum ou encore pendent de l’une ou l’autre des douze paires de côtes ou encore sont restées en travers du diaphragme, ce qui amène des difficultés respiratoires.” (p. 35)

Pneuma est réduite à la “ventilation pulmonaire” (p. 35)

Elle oppose à la philosophie de la vérité (d’essence masculine) une psychanalyse de la vérité (d’essence féminine).

Orthographe: «prosti-tuée».

Première farce écrite ce jour-là par Ancyl et intitulée un insecte en éprouvette: “Un jour dans une éprouvette une femme nommée Femme fabriquerait un insecte à mille pattes diverses et intersections. Ou encore: un jour une femme nommée Femme fabriquerait dans une éprouvette un oiseau à la cage thoracique et à l’échine transparentes. Ou encore: une femme nommée Femme fabriquerait un jour un poisson transparent. Il y a encore une zone noire sur la tête et l’échine. Quelqu’un passant par là pour s’amuser ajoute du noir liquide dans l’éprouvette et l’être en formation meurt aussitôt.” (p. 40)

Toujours l’appel à la psychanalyse (à croire que la littérature en devient une discipline psychanalytique): “La littérature qui était un art est devenue une science et la psychanalyse qui était une science est devenue un art. L’une et l’autre maintenant sont pratiquées par des calembourgeois qui assassinent les gens avec la fiente de leur esprit.” (p. 42-43)

Rhétorique chargée, non-sens: “Désir sidéré devenu indésirable, délire délié du lire tragique, déjoué de sa face ludique, moqué. Le plaisir s’en ressent. (Ressentiment). Ni apaisé, ni livré, ni délivré, ni pressenti, ni livre enfin! Quelle calembourgeoise je fais, pauvre de moi d’autre Ancyl! Dansant le tango du langage et quel tangage!” (p. 43)

Blanc sur noir: “On fait croire qu’elle n’existe pas. (Et elle se met entre parenthèses).” (p. 44)

Premier concerto. Le pique-nique

Moto: “En apparence, Socrate est amoureux de beaux garçons et tourne sans cesse autour d’eux avec des yeux ravis […]

C’est toujours ainsi, dit Alcibiade: quand Socrate est là, il est impossible à tout autre d’approcher des beaux garçons. Voyez à présent encore comme il a trouvé facilement une raison plausible de faire asseoir celui-ci près de lui!

3. La femme du Philosophe

Xanthippe est une personne consciencieuse. Elle travaille à remplacer dans tous les livres le mot HOMME par les motd ANTHROPE ou ANDRE selon le cas. Ou mieux (suggestion d’Ancyl), par HOMO ou par VIR, suivant qu’il s’agit d’un être humain ou d’un mâle de l’espèce. C’est parce qu’elle a le sens de la mesure, de l’équité, et aussi de la décence, qu’elle a entrepris une tâche pareille. Mais elle n’est pas très forte en latin et le jour où les hommes sont devenus des VIRUS au pluriel sous sa plume correctrice, nous lui avons conseillé de retourner à ses chères racines grecques.” (p. 52)

Socrate est “le gourou de service au siècle de Périclès.” (p. 52)

Exaltation des sens: “Toutes les femmes qui ont été fabriquées dans un utérus connaissent d’abord l’utérus, dit Xanthippe, ce lieu-dit géographique de l’environnement total, lieu où elles sont touchées de partout, ce qu’elles n’oublieront jamais – surtout quand leur corps sera soumis à la carence du Toucher et à la surabondance du Voir.” (p. 55)

Le toucher est le premier sens, dit Xanthippe à la fine main, et il est le sens premier.” (p. 56)

Le deuxième sens est le goûter. Les autres sont des “sens figurés” (p. 56).

Le toucher et le goûter sont les sens de la sensualité.

4. Le sang rouge d’Aphélie

Aphélie au bleu regard et au corps tout rond nous dit qu’elle a appris en rêve l’art de déguster. Expérience fut faite à l’état de veille et ça fonctionne. […] Aphélie nous dit en rougissant: Goûtez-moi.”

Troisième farce dite ce jour-là par Aphélie et intitulée Le festin funèbre (et où une femme nommée Femme est invitée à un repas ou elle (se) sert elle-même).

Quatrième farce dite ce jour-là par Aphélie et intitulée La jeune morte (et où Iphigénie est coupée en morceaux).

Cinquième farce dite ce jour-là par Ancyl et intitulée Flower Power (et où la maman d’un enfant se met une fleur au corsage et puis se met à voler).

Blanc sur noir:
♥ On fait croire qu’elle est morte et elle meurt.
♥ On fait croire qu’elle n’a pas été tuée.
♥ On fait croire que ce n’est pas son père qui l’a tuée.

5. Le menu du Banquet

Allusion à Socrate: “Nos préparatifs lui font penser [à Xanthippe – n.n.] au fameux banquet où son célèbre mari s’est distingué par ses propos.” (p. 69) Or, Socrate s’est distingué par ses idées, et non pas par une rhétorique spéciale.

Sur la démocratie, en faisant une allusion à Robert Flacelière, auteur de La Vie quotidienne en Grèce au siècle de Périclès, chap. II: “A ce propos justement, il faut savoir que ce n’est pas quarante mais douze pour cent des citoyens qui jouisaient de leur liberté à cette époque puisque les femmes et les enfants n’avaient pas plus de droits politiques et juridiques que les esclaves.” (p. 69) L’idée qu’un enfant de dix ans, par exemple, pourrait jouir des mêmes droits politiques que son père est particulièrement attirante…

Les orateurs sont des fameux gynophages. Aristote afirme que la jument est “femelle en vertu d’un certain manque de qualités” (p. 75).

Nous sommes considérées, nous les femmes, comme des personnes fictives dans l’histoire, cette histoire «sainte» et barbare que les ci-devant hommes ont arrangée scientifiquement pour leur plus grande gloire et profit. Indésirables, mises en marge de l’espace et du temps (sauf dans la fiction), nous sommes irréelles, anachroniques et extraterritoriales, nous sommes des extra-terrestres sur notre propre planète. Il nous reste à débarquer sur terre.” (p. 76-77)

La question alors sera de savoir quelle deviendra la place des hommes dans un monde où il y aura aussi des femmes.” (p. 77)

Sur Socrate, en méprenant le sens du terme «amour», par un abaissement parodique: “Bien sûr que c’est lui le professionel de l’amour! Mais s’il aimait caresser les cheveux de Phédon, s’il était affable et disert avec ses disciples, il n’avait jamais pour moi de ces tendresses qu’il prodiguait autour de lui et qui séduisaient tant les jeunes hommes. […] Quant à faire l’amour avec moi, vous savez…” (p. 78)

Toujours sur Socrate: “quelqu’un dont la bonne conscience est à tout épreuve du fait qu’il se croit obligé de donner mauvaise conscience aux autres…” (p. 79)

Joli fragment: “Aphélie demande alors à Xanthippe si elle n’a jamais eu envie de tuer son mari Socrate […]. Xanthipe répond que l’assemblée du peuple y a pourvu… bien qu’assez tard, ajoute-t-elle avec une pointe de regret.” (p. 80)

6. Le pique-nique sur l’Acropole

Les hommes: “les archontes éponymes qui règnent dans chaque maison et donnent leur nom à quatre murs, quatre personnes et quelques papiers d’identité.” (p. 85-86) Les hommes sont atteints de “cette maladie incurable appelée le phalludisme” (p. 86).

L’Acropole est le métaphore du patriarcat. Les Caryatides sont “clitoridectomisées” (p. 87). [Comme si l’essence de la femme était le clitoris. La vision est d’ailleurs en plein accord avec la métonimie qui reduit l’homme à son pénis.]

Question d’Aphélie: “Au fait, dit-elle, Socrate a-t-il jamais mangé un sandwich au cours de ses banquets?” (p. 93)

Xanthippe propose le choix d’un sujet de conversation: “Sur l’amour ou n’importe quoi, sur la beauté ou l’immortalité de l’âme, chacune pourrait parler à tour de rôle, ce serait amusant. Ouais. Pourquoi pas sur la sexualité? dit Epsiolonne aux longues jambes.” (p. 96-97). Ils parleront de “sexualités plurielles” (p. 97).

Deuxième concerto. Le dire des sexualités

Dédicace: “A la petite Adizetu qui vit en Afrique noire et qui ne montera jamais au paradis.”

7. Le dit d’Aphélie au bleu regard

Le sexe, dit-elle, est certainement la façon la plus ancienne de faire l’amour.” (p. 111) Autrement dit, avant d’inventer l’amour les hommes et les femmes copulaient. Le commencement énonce un principe, mais la phrase suivante fait une virevolte vers un détail, une situation particulière, qui est loin de pouvoir infirmer ou confirmer l’énoncé déjà fait: “En tout cas, c’est celle que j’ai toujours pratiquée jusqu’à maintenant, même ces dernières années […].”

Le mari d’Aphélie a une paresthésie du sens du toucher, qui lui ôte le désir de faire l’amour.

Parce que chaque fois que nous faisions l’amour, à partir d’une certaine époque, il y avait cette épiphanie déconcertante. Chaque fois c’était comme s’il avait ouvert une brèche dans mon corps qui se mettait a saigner.” (p. 112) Le plus déconcertant, et de loin, est l’emploi du mot «épiphanie».

Aphélie: “Je me caresse, mon p’tit cœur. Pour voir si je suis encore vivante. Je caresse mon sexe de femme, mon clitoris, ma hampe, mes petites lèvres, mes grandes lèvres, mon pubis, mes poils, mon pénil, ma vulve, mon vestibule, mon vagin… alouette et libellule…” (p. 113) Dénomination du sexe féminin: clitorivage.

Beaucoup de descriptions d’orgasmes.

Si on n’a plus de clitoris et on n’a plus de petites lèvres on ne peut plus jamais monter au paradis. Plus jamais.” (p. 115). Comme si «paradis» était synonyme d’«orgasme».

Trous de sagesse:
♥ “[…] tous ces critères de mesuration sont des diktats masculins” (p. 117) [Ce qui revient à confondre l’instrument avec la cause.]
♥ “[...] on est toutes enceintes du moment qu’on a un utérus et des ovaires. C’est ça le commencement de la grossesse.” (p. 117) [Ce qui revient a confondre une possibilité avec son accomplissement.]

Blanc sur noir: “L’Eglise catholique romaine condamne littéralement la masturbation. Elle refuse aussi aux femmes le droit de contrôler leur corps.” (Betty Dodson). (p. 119)

Encore, blanc sur noir: “La dénégation du clitoris (…) assure la suprématie des hommes depuis des siècles et du même coup la soumission des femmes (…). La masturbation est la solution pour rompre cet esclavage social parce qu’elle va à l’encontre de la répression.” (Betty Dodson). (p. 119)

8. Le dit d’Edith aux gestes précis

Pourquoi la masturbation et non pas le lesbianisme? “Les femmes qui s’aiment accomplissent ensemble une sorte de parthénogénèse, elles s’enfantent l’une l’autre sans qu’il y ait besoin du corps de l’homme entre elles ni de ce qu’il appelle sa «semence».” (p. 122)

Comble de philosophie» féministe: “Mais les femmes, qu’est-ce qu’elles trouvent dans leur lit? Quelqu’un de tellement étranger à leur sensualité, à leur sexualité, à leur affectivité, qu’elles sont incapables de jouir en sa présence et par son activité. Ça saute aux yeux cet échec. Pourquoi persévérer? Aussi, je ne comprends pas que les femmes se tournent vers les hommes alors que la jouissance se trouve du côté des femmes. D’ailleurs, c’est une déviation de leur orientation première puisque leur premier objet d’amour a été une femme et en cela elles ne diffèrent pas des hommes.” (p. 122-123)

Les femmes qui font l’amour avec des hommes souffrent d’une “déviation «masochiste»”. (p. 123)

9. Le dit d’Epsilonne aux longues jambes

Adizetu a un chat dans la gorge (elle toussote).

Alusion au Banquet: “C’est une loi physique que les contraires s’attirent – comme on le sait depuis Héraclite – et c’est en unissant non les mêmes sons mais des sons différents qu’on obtient une musique harmonieuse.” (p. 128)

Epsilonne à Adizetu: “Je vais te dire une bonne chose: la vérité, la vraie de vraie, elle ne sort pas de la bouche des philosophes, ni de celles de psychanalystes, ni de celle des dieux. Elle ne sort pas non plus de la bouche des grandes personnes. Elle sort de la bouche des enfants comme dit le proverbe.” (p. 132)

10. Le dit d’Adizetu aux yeux luisants

Confusion totale d’Adizetu: “Il me semblait bien aussi des fois, quand je disais des mensonges, c’était comme si la vérité me sortait de la bouche…” (p. 135)

D’après elle [une chatte qui parle], les femmes humaines sont comme coupées en mille morceaux et leur vie se passe à trouver les morceaux et à les recoller aux bons endroits. Tandis que les hommes humains sont coupés en deux morceaux seulement, la tête d’un côté, le sexe de l’autre, et qu’entre les deux il y a le corps qui flotte sans savoir s’il appartient à la tête ou au sexe. En tout cas, elle a dit que les hommes ne cherchaient pas à recoller leurs deux morceaux à leur corps flottant, ils étaient bien trop occupés pour se mettre à faire cela. Chaque petit morceau de femme se promène sur deux pattes d’oiseau et chacun des deux morceaux d’homme sert de patte à l’autre: des fois c’est la tête qui transporte le sexe et des fois c’est le sexe qui transporte la tête. Mais ils ne se collent jamais parce que le corps flottant doit pouvoir passer entre les deux de temps en temps quand il est dan les parages…” (p. 136)

Blanc sur noir: “En conséquence, plus la femme a d’orgasmes, plus ils sont forts, plus elle en a, plus elle veut en avoir. Autrement dit: la femme humaine est sexuellement insatiable en présence des plus hauts degrés de saturation sexuelle.” (Marie Jane SherFey) – (p. 141)

Blanc sur noir: “La femme excisée se trouve souvent réduite à l’état de vagin et de femelle reproductrice.” (Awa Thiam) – (p. 143)

Blanc sur noir: “La clitoridectomie est le moyen le plus barbare qui soit de priver la femme de toute satisfaction sexuelle.” (Jania Mac Gillivray) – (p. 143)

11. Le dit des «Blessures Symboliques»

Des descriptions de clitoridéctomies.

Le “tissu symbolique” comme “tissu orgasmique”.

Bien difficile à contrecarer: “Je me demande pourquoi on n’arrache pas leur zizi aux petits garçons? On leur enlève rien qu’un morceau de peau, c’est pas juste!” (p. 150)

Puis ça continue: “D’un côté on enlève une peau jugée superflue et de l’autre on extirpe un organe et sa racine. Celui-ci, «comme par hasard», se trouve être l’organe de la jouissance féminine! C’est quand même pas croyable qu’on les mette toujours dans le même panier ces deux-là: circoncision et excision!” (p. 150)

Conclusion clitoridectomique: “Voilà pourquoi, dit Edith, l’ablation de cet organe est d’une telle cruauté. Tout le monde, les hommes comme les femmes de tous les continents, devraient se sentir concernés par ce problème puisque la jouissance est affaire de tout le monde!” (p. 154)

Cela est bien bonne: “Si tu persuades quelqu’un qu’il n’a pas de langue, il ne parlera pas. De même, si le clitoris est nié, il ne fonctionnera pas. D’une part, on l’excise psychologiquement, on s’en occupe peu ou pas du tout dans le rapport sexuel (c’est peut-être une des causes qui font que celui-ci est «impraticable»), on veut ignorer sa capacité de jouissance spécifique.” (p. 154-155)

Quelle abomination, quelle abominaion que la clitoridectomie, dit Aphélie.
Aphélie dit soudain chut. C’est l’heure du crime. Un père mutile sa fille par mère interposée.
Des millions de pères castrent leurs filles, dit et redit Edith.
C’est la chasse aux sorcières du vingtième siècle qui continue, dit Epsilonne.
Des sorcières de quatre ans, des sorcières de sept ans, de douze ans. Il faut les éliminer par centaines de milliers.
Il faut les éliminer une par une par millions, dit Xanthippe.
Dans vingt-six pays d’Afrique. Gynocide, dit Ancyl.
Gynocide actuel en Afrique. Gynocide actuel en Europe où se pratique la clitoridectomie psychologique, et pas seulement sur les prostituées. Honte à la Loi.
Gynocide actuel an Amérique, dit Adizetu. Honte à la Loi symbolique de nos pères.
Gynocide actuel en Asie, en Océanie, en Australie. Honte à la culture qui nous bâillonne et qui nous coupe la langue. Honte au langage. Honte à la «pantomime théâtrale de la virilité».
Gynocide actuel aux quatre coins du monde, disent les femmes réunies sur l’Acropole, en cette nuit contemporaine, gynocide actuel et archaïque répètent-elles avec colère partout sur la Terre des Hommes où les Hommes ont besoin de castrer les femmes pour se prouver qu’ils sont des Hommes
.” (p. 155-156)

Reproches sur le support rituel de la clitoridectomie: “Suprême inconscience des Hommes qui ne voient là qu’une «blessure symbolique» liée à un «rite de passage», dit Edith. Voici ce que je leur demande à ces Hommes: de quel «passage» pensent-ils qu’il s’agit ici? S’agit-il d’un «passage rituel» à une vie libre d’adulte au sein d’une communauté ayant ses us et coutumes? Parfait! La blessure dite symbolique peut alors se justifier. Mais peuvent-ils me dire comment un individu châtré devient un adulte? En quoi est-il permis à cet individu de faire usage de sa liberté? Et surtout, comment peut-il se sentir un membre à part entière de sa communauté, tout en étant irrémédiablement mutilé? Même si c’est pour appartenir à cette communauté qu’il a subi cette mutilation irréversible commdément appelée «rite de passage»?” (p. 156-157)

Encore des reproches: “Et si on leur disait: «Nous ne t’avons pas enlevé ta capacité de te reproduire, puisque nous avons prélevé suffisamment de sperme pour te faire une descendance par insémination artificielle?» Et si je leur demande encore à ces Hommes: à quoi ressemblent les rapports sexuels d’une femme excisée, dont l’excision est réelle ou psychologique, sinon à des séances d’insémination artificielle?” (p. 157)

Blanc sur noir: “L’excision est un geste qui plaît à Allah” (Parole d’un grand mufti de la Mecque au XXe siècle, citée par Jania MacGillivray).

12. Le dit de Xanthippe à la fine main

Elle raconte ses multiples expériences sexuelles. Choix ultime: initiation des jeunes garçons.

Blanc sur noir: “Les hommes doivent leur virilité à une pantomime théâtrale qui serait réduite à néant si les éléments véritables étaient connus.” (Margaret Mead) – (p. 168)
Encore!

vendredi, septembre 08, 2006

Jean Cocteau, L’aigle à deux têtes (notes de lecture)





Pièce à sujet romantique, à la manière de Victor Hugo.

Exergue: « Elle ne pouvait compter sur rien, pas même sur le hasard. Car il y a des vies sans hasard. » (H. de Balzac)

Dans la préface Cocteau témoigne: « J’imaginais donc de mettre en scène deux idées qui s’affrontent et l’obligation où elle se trouvent de prendre corps. » Les idées: une reine d’esprit anarchiste, un anarchiste d’esprit royal.

Sur l’impacte du cinéma face au théâtre: « Depuis quelque temps je cherchais les causes d’une certaine dégénérescence du drame, d’une chute du théâtre actif en faveur d’un théâtre de paroles et de mise en scène. Je les mets sur le compte du cinématographe qui, d’une part oblige le public à voir les héros interprétés par des artistes jeunes, d’autre part habitue ces jeunes artistes à parler bas et à remuer le moins possible. Il en résulta que les bases mêmes des conventions théâtrales furent ébranlées, que disparurent les Monstres sacrés, qui de leurs tics, de leurs timbres, de leurs masques de vieux fauves, de leurs poitrines puissantes, de leur propre légende, formaient le relief indispensable au recul des planches et aux lumières d’une rampe qui mange presque tout. Ces vieux Oreste, ces vieilles Hermione se démodèrent, hélas, et, faute de cariatides pour les porter, les grands rôles disparurent avec. On leur substitua, sans même s’en rendre compte, la parole pour la parole et la mise en scène. Paroles et mise en scène prirent alors une place don’t les Sarah Bernhardt, les de Max, les Réhane, les Mounet-Sully, les Lucien Guitry, n’eurent jamais la moindre idée. Sur les planches o évoluaient ces ancêtres, la mise en scène se faisait toute seule et le décor ne parlait pas plus haut qu’eux. »

Le point de départ de la pièce est un événement historique, la tragédie de Krantz assassinat de la reine de Bavière, poignardée dans le dos.

Personnages

La reine, 30 ans
Edith de Berg, 23 ans
Stanislas (dit Azraël), 25 ans
Félix de Willenstein, 36 ans
Le comte de Foëhn, 45 ans
Tony (nègre sourd-muet au service de la reine)

Le premier acte: Chambre de la reine
Deuxième acte: Bibliothèque de al reine
Troisième acte: Même décor

Action

Le premier acte commence par une discution entre Edith et Félix, nobles qui jouent le rôle de domestiques de la reine. Ils lui font une caractérisation indirecte.

Edith dit: “La reine aime les insectes et les chauves-souris.” (I, 1)

Félix dit: “La Majesté se moque de l’étiquette et du cérémonial.” (I. 1)

La reine adore les orages et le galop.

Félix et Edith préparent le dîner que la reine veut prendre en compagnie de l’ombre du roi Frédéric, assassiné le matin de leur marriage.

Félix et Edith cachent une vieille histoire d’amour, leur mariage à eux a été refusé par l’archiduchesse (belle-mère de la reine).

Félix témoigne avoir vu le visage de la reine (couvert d’habitude d’un voile et d’un éventail). « J’étais le chasseur en train de viser un gibier qui se croit invisible et qui ne pense pas qu’il existe des hommes. Elle avançait sans éventail et sans voile. Une longue, longue robe noire et sa tête si haute, si pâle, si petite, si détachée, qu’elle ressemblait à ces têtes d’aristocrates que la foule des révolutions porte au bout d’une pique […] Je regardais de toutes mes forces […]. » (I, 1)

Toujours Félix: « Elle rayonnait de poignards comme une vierge espagnole. Son visage était si beau qu’il faisait peur. […] J’ai vu la reine, Edith. C’est une morte. » (I, 1) Ces paroles sont prémonitoires.

La reine: « Je n’ai jamais eu peur que du calme. » (I, 2)

L’archiduchesse, c’est l’étiquette. La reine, c’est l’orage.

Le souper avec l’ombre du roi, c’est une invention de la reine au niveau de l’étiquette (ce qui est une contradiction en termes, vu que l’idée d’étiquette refuse toute nouveauté personnelle).

Déjeuner de la reine seule. Monologue à haute voix, comme si le roi défunt y participait. La reine tire les cartes, à la manière des bohémiennes. Les cartes montrent toujours la même chose. « Toi, moi, les traîtres, l’argent, les ennuis, la mort […] les cartes n’annoncent rien qu’on ne sache. »

La reine accueille et cache dans sa chambre un jeune homme blessé, qui avait entré par la fenêtre. Tout de suite, Edith vient la prévenir que la police chasse un malfateur qui cherche à l’assassiner.

Stanislas avait publié sous le nom d’Azraël (l’ange de la mort dans la théologie judaïque) un poème: Fin de la Royauté. Son apparition physique ressemble curieusement à celle du roi assassiné, tel qu’elle a été retenue par un portrait.

La reine soigne l’anarchiste. « Quoi? Vous me demandez qui vous êtes? Mais, cher monsieur, vous êtes ma mort. C’est ma mort que je sauve. C’est ma mort que je cache. C’est ma mort que je réchauffe. C’est ma mort que je soigne. » (I, VI)

La reine raconte: « J’ai même obtenu de mes chimistes un poison que j’ai suspendu à mon cou et qui est une merveille. La capsule est longue à se dissoudre. On l’absorbe. On sourit à sa lectrice. On sait qu’on porte sa fin en soi et nul ne s’en doute. On s’habille en amazone. On monte à cheval. On saute des obstacles. On galope. On galope. On s’exalte. Quelques minutes après, on tombe de cheval. Le cheval vous traîne. Le tour est joué.
Je conserve cette capsule par caprice. Je ne l’emploierai pas. Je me suis vite rendu compte que le destin doit agir tout seul.
» (I, 6)

Auto-caractérisation: Qu’est-ce que c’est qu’une reine? « Une femme en robe de cour qui tâche de gagner du temps » (I, VI).

Stanislas se tait, la reine parle. Le monologue antérieur avec le roi mort est remplacé avec un autre, avec sa sosie.

Edith: « Quand la reine décide une chose, ce n’est pas à moi de vous apprendre qu’elle ne se laisse influencer par personne et qu’elle arrive toujours à ce qu’elle veut. » (II, 3)

La reine: « Si je n’étais pas reine, je serais anarchiste. En somme, je suis une reine anarchiste. C’est ce qui fait que la cour me dénigre et c’est ce qui fait que le peuple m’aime. » (II, 4)

La première allusion au titre de la pièce: « La première fois que mon père a tué un aigle, il n’en revenait pas parce que l’aigle n’avait pas deux têtes comme sur nos armes. » (II, 5)

Stanislas reproche à la reine d’ignorer « les ténèbres qui sont ce qui n’est pas elles » (II, 5), de croire que sa vie d’hommes « commence à la fenêtre du château de Krantz » (II, 5).

Repproche: « J’ai rencontré des homes que ces hontes écœurent et qui les attribuaient à votre règne. Où étiez vous? Dans un nuage. Vous y viviez votre songe. Vous y dépensiez des fortunes, vous vous y bâtissiez des temples. Vous évitiez superbement le spectacle de nos malheurs. On vous a tué le roi. Est-ce ma fente? Ce sont les risques de votre métier. » (II, 5)

Stanislas tombe amoureux et témoigne son amour pour la reine: « Quand je suis entré dans votre chambre, j’étais une idée, une idée folle, une idée de fou. J’étais une idée en face d’une idée. […] Quand je suis revenu à moi, j’étais un homme chez une femme. » (II, 5)

La reine: « Si ma devise n’était pas: “A l’impossible je suis tenue”, je choisirais la phrase d’un chef indien auquel on reprochait d’avoir un peu trop mangé au dîner d’une ambassade: “Un peu trop, répondit-il, c’est juste assez pour moi!” » (II, 8)

Stanislas devient le lecteur de la reine, et remplace ainsi dans cette fonction Edith. Le Comte de Foëhn obtient une entrevue avec la reine. Stanislas assiste caché, avec la permission de la reine.

Le Comte de Foëhn: « Votre Majesté a bien tort de s’intéresser aux poètes. Ils finissent toujours par introduire leur désordre dans les rouages de la société. » (II, 8)

Comte de Foëhn, chef de la police, avoue à la reine avoir arrêté Azraël. C’est une duperie classique, par laquelle le fonctionnaire veut vérifier les réactions de la souveraine.

La reine dit à Stanislas: « Vous êtes une solitude en face d’une solitude. Voilà tout. […] Une femme et un homme qu’on traque. Des égaux. » (II, 9)

La reine croit que le comte de Foëhn n’est pas loin de l’attentat, qu’il avait connu et encouragé Stanislas, pour pouvoir devenir lui-même régent après sa mort.

L’amour de l’anarchiste et de la souveraine va de pair avec la mort: « Mes genoux sont sous votre tête et ma main sur elle. Votre tête est lourde. On dirait une tête coupée. » (II, 9)

Edith jette de sa fenêtre un billet au comte de Foëhn. La reine conseille à Stanislas de fuir le château. Celui-ci exige que la reine change de mode de vie, qu’elle quitte son isolation pour commencer à régner. « On complote contre vous. C’est facile, vous ne répondez rien. Les ministres le savent. Répondez-leur. Changez en un instant votre mode d’existence. Retournez dans votre capitale. Etincelez. Parlez à l’archiduchesse comme une reine et non comme une belle-fille. Ecrasez Foëhn. Nommez le duc de Willenstein généralissime. Appuyez-vous sur ses troupes. Passez-les en revue, à cheval. Etonnez-les. Vous n’aurez même pas à dissoudre les chambres ni à nommer de nouveaux ministres. Ils obéissent à une poigne. Je connais la vôtre. Je vous ai vue, cette nuit, tenir votre éventail comme un sceptre et frapper les meubles avec. Frappez les vieux meubles dont les tiroirs regorgent de paperasses. Balayez ces parerasses et cette poussière. Votre démarche suffit à faire tomber le peuple à genoux. Relevez votre voile. Montrez-vous. Exposez-vous. Personne ne vous touchera. Je vous l’affirme. Moi, je contemplerai votre œuvre. Je vivrai dans vos montagnes. Je les connais depuis toujours. Aucune police ne saurait m’y prendre. Et quand ma reine sera victorieuse, elle fera tirer le canon. Je saurai qu’elle me raconte sa victoire. Et quand la reine voudra m’appeler, elle criera comme un aigle, je viendrai m’abattre sur les pics où elle bâtissait ses châteaux. Je ne vous offre pas le bonheur. C’est un mot déshonoré. Je vous offre d’être, vous et moi, un aigle à deux têtes comme celui qui orne vos armes. Vos châteaux attendaient cet aigle. Vous les bâtissiez pour être ses nids. » (II, 10)
Edith arrange une entrevue entre Stanislas et le comte de Foëhn. Le chef de la police caractérise le geste incongru de la reine d’avoir imprimé et distribué à la cour le poème d’Azraël: « La reine est libre. Ce sont là des farces qui l’amusent. Seulement, il lui arrive de ne plus se rendre compte du désordre provoqué par des farces qui ne lui représentent, de loin, que des caprices, et qui prennent un sens beaucoup plus grave lorsqu’elle se produisent en public.
» (III, 2)

Le chef de la police demande à l’anarchiste de veiller sur la volonté politique de la reine, de devenir en quelque sorte un instrument politique. « Je vous demande seulement que votre influence occulte nous aide à empêcher la reine de se jeter dans un échec. Je vous demande de vous arranger pour la suivre dnas sa capitale et d’empêcher l’affreux désordre que ne manquerait pas de produire une hostilité ouverte de la reine contre l’archiduchesse, les ministres, le conseil de la couronne, les chambres et le parlement. Ai-je été clair? » (II, 2)

Menace: « La puissance d’une reine a des limites, cher monsieur. Celle d’un chef de la police n’en a pas. » (III, 2) Stanislas ne veut pas coopérer. Le comte veut l’arrêter mais ils conviennent de ne pas le faire avant le départ de la reine. Stanislas jure de se rendre.

La reine: « Rendre beau le bonheur, voilà le tour de force. Le bonheur est laid […], s’il est absence de malheur, mais si le bonheur est aussi terrible que le malheur, c’est magnifique! » (III, 6)

Stanislas témoigne avoir écrit, dans son obsession sur la reine, d’autres textes, pires encore que celui publié. « Je n’écrivais pas. Je t’écrivais. » (III, 6) Ainsi, l’approche des deux personnages se fait à partir d’un texte, par des textes. Il évoque le projet de tuer la reine et de se suicider comme « une façon définitive de faire l’amour » (III, 6).

La reine avertit Félix qu’elle doit entreprendre un acte extraordinaire, le prix de son règne. Juste avant son départ, Stanislas lui avoue qu’il vient d’avaler la poison enfermée dans son médaillon, qu’il avait trouvé abandonné dans la bibliothéque. Il explique: « Je n’ai pas agi par crainte. En un éclair, je me suis rendu compte que rien n’était possible entre nous, qu’il fallait vous rendre libre et disparaître en plein bonheur. » (III, 8)

La reine dit à Stanislas que leur amour n’était pas vrai, qu’elle avait simulé: « Les reines n’ont guère changé depuis Cléopâtre. On les menacent, elles enjôlent. Elles choisissent un esclave. Elles en usent. Elles ont un amant, elles le tuent. » (III, 8)

La reine résume la pièce (le texte de Cocteau sur lui-même): « Premier acte: on veut tuer la reine. Deuxième acte, on veut convaincre la reine de remonter sur son trône. Troisième acte, on la débarrasse d’un héros indiscret. » (III, 8). Stanislas devient « on ».

Stanislas poignarde la reine. Avant de mourir, elle avoue l’avoir menti quand elle témoignait avoir menti sur son amour. Elle l’aime toujours, dans la mort, mais elle voulait le rendre fou, pour se faire tuer. Stanislas se meurt, lui-aussi, par l’effet de le poison.

L’aigle à deux tête est un vieux symbole héraldique présent sur les armoiries de plusieurs maisons royales européennes. Son sens est, tout court, la fraternité qui doit exister entre le pouvoir royal et celui sacerdotal (mis, maladroitement, au même niveau). La trouvaille de Cocteau est d’en faire l’image de l’amour de deux êtres qui deviennent un.
Encore!

mercredi, septembre 06, 2006

Laure Conan, L’oublié (notes de lecture)

Publié chez Fides, Montréal, 1975.

Il est vrai que nous sommes peu nombreux, mais pour preux et hardis nous le sommes.” (Chanson de Roland)

I

LeClercq – “la sainte colonie”.

Décor: “Sur la Pointe-à-Callières, à travers des champs cultivés, on apercevait une trentaine de petites maisons solides, à toit pointu, protégées par des redoutes. Deux de ces redoutes attenaient à l’hôpital bâti sur le coteau et environné d’une haute palissade. L’asile des blessés disparaissait presque entièrement derrière ces grands pieux sinistres; on n’en voyait guère que le toit surmonté d’un svelte clocher où l’on sonnait le tocsin à chaque attaque des Iroquois.” (p. 227)

Personnages:
- M. de Maisonneuve;

- M. de Brigeac, secrétaire de M. de Maisonneuve;

Maisonneuve regarde les maisons des colons: “Ces nids de soldats, si chétifs devant la majesté des solitudes, avaient à ses yeux une grandeur, une beauté sacrée. C’étaient les assises de l’œuvre à laquelle il avait tout immolé, les commencements de cette puissante ville qu’il était venu fonder, au milieu de tant de périls, en l’honneur de la Vierge.” (p. 228)

Maisonneuve: “ces diables d’Iroquois” (p. 228).

Dialogue entre Maisonneuve et Brigeac (le thème du sacrifice et l’antithèse vie – mort):

– C’est vrai. Pourtant il y a des cendres qui communiquent le feu de la vie à la terre qui les reçoit, répliqua tranquillement Maisonneuve. Voyez-vous, il faudrait sauver donner ses sueurs comme on donne son sang. Nul de nous n’est ici pour faire fortune.
- Non, Dieu merci! dit vivement Brigeac, relevant sa tête brune. Ce n’est pas la cupidité qui nous a amenés à Montréal. Nous autres, nous ne courons ni après l’or, ni après les belles fourrures.
- Ah! S’il ne fallait que du désintéressement, s’écria Maisonneuve; mais il nous faudra une constance bien obstinée. Les premiers pas de la civilisation sont ici prodigieusement difficiles. Je le crains, il ne s’écoulera encore bien du temps avant que nous ayons un peu de repos, un peu de sécurité
.” (p. 228-229)

Le thème de la mission sacrée, dans le discours de Maisonneuve: “On nous fait la guerre la plus horrible peut-être qu’on vit jamais. Le danger est partout… vous et mois, nous périrons peut-être; mais soyez tranquille, mon cher, l’œuvre vivra, car la fondation de Villemarie est un dessein venu du ciel.” (p. 229)

L’imagerie religieuse: “L’île de Montréal appartient à la sainte Vierge.” (p. 230)

Maisonneuve: “l’idéaliste et l’héroïque fondateur” (p. 230)

Théologie confisquée: “la peine c’est la pierre angulaire” (p. 230)

Evidemment, les phrases suivantes excluent les amérindiens de l’humanité: “Etre homme, dure condition, fit Brigeac, qui avait pris la peau de chamois et la passait et repassait sur son poignard; mais j’ai lu quelque part qu’il vaudrait mieux brûler cent ans dans une fournaise que d’être privé de la moindre souffrance que Dieu veut nous donner.” (p. 230)

Prévisiblement, c’est au nom de la Vierge que les chrétiens agissent, c’est un saint M. Olier qui avait reçu l’ordre de fonder la ville de Montréal, un ordre venu du ciel…

Sur une miniature de la Vierge, portée par M. de Maisonneuve: “Sainte Mère de Dieu, pure, au cœur loyal, / Gardez-nous une place en votre Montréal.” (p. 232)

De nouveau, chez Maisonneuve: “Iroquois, ces démons incarnés” (p. 232)

Anglais vs. Français: “Oui, mais les Puritains traitent les Indiens comme des bêtes fauves. Il ne faut pas que la civilisation leur apparaisse comme une force brutale. Nous autres, nous subissons la guerre, mais nous voulons la paix… Nous voudrions ne former avec ces malheureux qu’une seule famille; nous voudrions leur donner la civilisation, la foi, tous les biens.” (p. 232-233)

Claude de Brigeac: “Comme c’est bien de la France généreuse, fraternelle, dit Claude de Brigeac avec émotion. Quoi qu’il arrive, non, jamais je ne regretterai d’être venu à Montreal. Je ne sais si les autres sont comme moi, mais je m’y sens sur la plus haute cime humaine.” (p. 233)

L’état des colons passe pour celui d’une pureté virginale, selon Maisonneuve: “Il fait bon de respirer un air que ne souillent ni l’envie, ni la cupidité, ni l’hypocrisie.” (p. 233)

Villemarie est en fait une grande monastère: “C’est que nous sommes à Villemarie pour nous dévouer, pour nous sacrifier, pour braver le danger, pour mépriser la mort, s’écria Claude de Brigeac rayonnant d’ardeur. Et c’est si beau quand on y songe!” (p. 234)

Mlle Elisabeth Moyen parvient dans un canot, après un enlèvement.

II

Image: “L’Iroquois s’était levé, effrayant et superbe. Appuyé sur son aviron, il promena sur les Français son regard flamboyant, et dit avec une politesse étrange et hautaine:” (p. 235)

Changement de prisonniers.

III

Le mot d’ordre pour le commencement de la nuit: “Maintenant, dit le noble chef, vive Notre-Dame! c’est le mot d’ordre pour cette nuit. Priez-la, mes braves. Nous sommes ici pour sa gloire, et dans la multitude des voix qui crient vers elle, nous pouvons espérer qu’elle distingue les nôtres.” (p. 237)

La fille: “Elle entra aussi timide, aussi craintive qu’une colombe tombée dans un nid d’aigles. Vis-à-vis de la porte, sur la cheminée, il y avait une statue de Marie, et cette vue apporta à la pauvre enfant une émotion nouvelle.” (p. 237)

J’aurais juré que c’est du Paul Féval: “Comme si elle eût aperçu la Vierge elle-même, elle tomba à genoux et un flot de larmes jaillit de son cœur.” (p. 237)

M. Lambert Closse, celui qui capturé le chef Iroquois: “Une bandelette de toile, souillée de taches roussâtres, encore collée sur le front de Lambert Closse, à la naissance de sa forte chevelure, attestait que le danger avait été bien grand.” (p. 238)

La Sœur Marguerite Bourgeois.

Rien n’est oublié dans l’imagerie chrétienne: “Vous savez, n’est-ce pas, dit-il, que Montréal a deux anges?” (p. 239)

L’amour d’Elisabeth Moyen: “Il lui semblait que l’herbe l’aurait portée, il lui semblait qu’elle aurait marché sans crainte, sans fatigue, jusqu’au bout du monde, à côté de ce compagnon dont elle osait à peine regarder l’ombre sur le bord du chemin. Une joie étrange l’envahissait, la pénétrait, et comme pour exprimer cette joie divine qui débordait en larmes silencieuses, la voix du rossignol s’éleva tout à coup sous l’épaisse feuillée.” (p. 240)

Encore un personnage: “C’était l’héroïne de Villemarie, cette admirable Jeanne Mance, que M. Olier voyait en esprit «environnée de la lumière divine comme d’un soleil».” (p. 241)


IV

Les souvenirs d’Elisabeth: “Le nom de Lambert Closse était célèbre dans la Nouvelle-France. Maintes fois, Elisabeth avait entendu parler de ce brave entre les braves, et elle trouvait un bonheur étrange à revivre les quelques minutes qu’elle avait passées seule avec lui. Il lui semblait sentir toujours le contact de cette virile main, qui s’était refermée sur la sienne; et, à la pensée que le héros avait failli être scalpé pour elle, tout son cœur se fondait d’attendrissement et de délices.” (p. 242-243)

Sur Jeanne Mance: “Des années auparavant, quand cette prédestinée aux héroïques sacrifices, secrètement attirée vers le Canada, avait quitté sa ville de Nogent, pour venir partager les misères et les périls des colons de Montréal, on avait cru qu’elle allait à Paris faire admirer sa beauté. Cette beauté s’était bien altérée; mais malgré les humbles besognes, les manières de l’héroïne étaient restées nobles et gracieuses.” (p. 244)

Sur l’insécurité des lieux et la vaillance des chrétiens: “la Vierge nous garde, et ceux qui nous défendent sont bien braves, ajouta Mlle Mance avec fierté. Les Iroquois ont dispersé trente mille Hurons, mais ils n’ont pu forcer ce poste défendu par une cinquantaine de Français… Ils ont toujours la fièvre du sang, la soif du carnage; mais maintenant, il y a parmi eux qui disent: «N’allons plus à Montréal, ce sont des démons.»” (p. 245)

Les Iroquois sont “les ennemis de Dieu”, mais aussi “les grands ennemis de la foi” (p. 246)

Jeanne raconte: “Puis, vous savez, les fondateurs de Ville marie n’ont qu’un but, la gloire divine. On ne reçoit pas le baptême pour se tenir à l’écart des intérêts de Jésus-Christ… D’ailleurs, on ne choisit pas sa vocation. Je n’y pouvais rien. Toute mon âme s’en allait vers la Nouvelle-France. Je ne savais trop pourquoi, par exemple, je ne voyais pas ce que j’y pourrais faire… je le compris, quand je rencontrai M. de la Deauversière à La Rochelle.” (p. 246-247)

L’île de Montréal est “une sorte de paradis terrestre” (p. 248)

Un miracle: l’inondation arrêtée par la croix.

Toujours Jeanne: “Ma chère enfant, puisque Villemarie est fondée pour étendre le règne de Jésus-Christ, il faut qu’elle porte le signe de la Passion, il faut que tout y saigne, que tout y souffre.” (p. 249) La souffrance est valorisée théologiquement.

De nouveau: “On veut faire revivre à Montréal la charité, la pureté de la primitive Eglise… L’on n’y songe qu’à faire des folies pour Dieu; et lorsqu’on reproche au major de tant s’exposer, il répond: «Je ne suis venu ici que pour combattre et mourir pour Dieu.»” (p. 251)

V

Elisabeth, dans une lettres dédiée à la mère de l’Incarnation: “Nous sommes toujours en péril. Ce poste, sans cesse attaqué, ne se soutient que par une sorte de miracle. Ce serait à mourir de frayeur, sans la foi des colons qui semblent voir les mains protectrices de la Vierge étendues sur eux. Ah! que vous les admiriez! C’est une colonie d’apôtres, de héros, qui semble une seule famille. Rien ne ferme à clef dans les maisons. Entre eux, tout est commun. Ils vivent comme les fidèles de la primitive Eglise vivaient, en attendant l’heure du martyre.” (p. 253)

L’intention du livre est apologétique. Son correspondant culturel est le western.

Progrès de l’amour: “Ces alarmes et ce qu’elle entendait chaque jour raconter fortifiaient et exaltaient le sentiment que le héros de Villemarie lui avait inspiré. Elle en ignorait le nom: elle n’y voyait que de la reconnaissance, de l’admiration… Lambert Closse lui apparaissait tellement au-dessus d’elle que la pensée la plus lointaine d’en être aimée un jour ne pouvait lui venir. Mais, lorsqu’elle entendait prononcer son nom, le soleil lui semblait verser une plus belle lumière.” (p. 254-255)

Le culte de la Vierge emporte sur beaucoup d’autres aspects du christianisme: “Cette pensée de la Vierge animait tout, éclairait tout, à Villemarie. L’héroïsme opiniâtre se fondait dans son culte. L’image de Marie était brodée sur le drapeau; elle brillait sur le mur de chaque maison, comme une étoile; et, grâce à elle, une sorte de paix planait au-dessus de toutes les angoisses.” (p. 255)

on vivait en plein cannibalisme à Villemarie; mais jamais population ne fut plus pénétrée de l’idée céleste.” (p. 256)

VI

Villemarie est une ville catholique.

M. de Maisonneuve part en France. Lambert Closse reste chef de la ville pendant son départ.

Le souvenir de la première messe célébrée en plein air, pour la fondation de la ville.

Cliché: “la lutte entre la civilisation et la barbarie” (p. 260)

Je ne puis voir la fumée de ces toits, dit Maisonneuve, sans penser qu’elle monte vers Dieu, comme un encens très pur.” (p. 261)

VII

L’amour d’Elisabeth grandit pendant l’hiver.

Les personnages sont appelés simplement: “le héros” (Lambert Closse), “l’héroïne” (Jeanne Mance).

Toujours le thème du sacrifice dans les discours de Lambert Closse.

“«Que la Vierge vous garde!» dit Elisabeth avec ferveur. Son regard, son accent, firent tressaillir le major. «Qu’elle me garde surtout de toute lâcheté et qu’elle vous donne le bonheur», répondit-il, sans trop savoir ce qu’il disait.” (p. 265)

Lambert Closse tombe amoureux lui-aussi.

VIII

A Villemarie les colons chantent des hymnes à la Vierge.

Pour elle, Lambert Closse était un être à part, surhumain, possédé tout entier par une passion héroïque, et touché de la seule gloire de Dieu. Cependant «l’histoire de l’amour est l’histoire du genre humain», et aux jours des persécutions, dans les prisons horribles où les chrétiens attendaient le jour du martyre, l’amour a parfois troublé le cœur de ceux qui venaient de confesser le Christ.” (p. 268)

Claude de Brigeac tombe amoureux lui-aussi d’Elisabeth.

Des événements historiques: “A Villemarie, c’était toujours la même vie. L’audace des Iroquois n’était pas abattue. Loin de là, ils poursuivaient et tuaient jusqu’aux portes de Québec les Hurons fugitifs qui avaient demandé protection aux Français. Dans une descente, ils firent prisonniers quatre-vingt de ces malheureux et défilèrent en plein jour sous les canons du fort Saint-Louis, et le gouverneur n’osa rien tenter pour secourir les alliés.” (p. 269)

Les Iroquois – “les plus féroces et les plus intrépides des hommes” (p. 269)

Les Iroquois demandent des missionnaires et la paix. En juillet 1656, 55 hommes sont partis chez les indiens.

Pour Lambert Closse les Iroquois sont “ces démons” (p. 270), “ces serpents” (p. 270)

Sœur Marguerite Bourgois, en relatant les opinions d’un iroquois mouribond: “ce qu’il a entendu dire de la loi du pardon lui fait mépriser le christianisme. Vous savez comment la passion de la vengeance est terrible dans ces cœurs sauvages. Il dit que l’homme qui ne se venge pas est un lâche, que les robes noires et les femmes n’y entendent rien, - que là-dessus il ne pourrait croire qu’un guerrier et qu’il faudrait savoir ce qu’en pense le Diable blanc.” (pp. 270-271)

Le calumet de la paix.

L’Iroquois attaque Lambert Closse, mais Elisabeth lui sauve la vie. La scène a une haute signification: l’indien attaque quand il est prêt a accomplir le rituel de la paix et de la communion. Elle est aussi invraisemblable: une jeune fille détourne le coup d’un guerrier.

IX

Le bonheur d’Elisabeth: “Profondément aimante, elle était à l’âge de la sensibilité extrême, des expérances infinies; et celui qu’elle aimait sans le savoir, celui qui portait au front l’auréole, elle venait de le sauver de la mort… Lui, le fort, l’intrépide, elle l’avait vu à ses pieds, tout frémissant d’inquiétude et de tendresse.” (p. 274)

De nouveau du bas roman populaire: “Oh, comme elle aimait sa blessure! comme elle aimait sa souffrance!” (p. 274)

Changements dans le cœur de Lambert Closse: “L’amour avait triomphé des partis pris surnaturels, héroïques. Il se sentait enivré et confus. Un charme inconnu l’enlevait à l’âpre réalité, aux obligations austères; sa jeunesse était revenue ardente, entière.” (p. 275)

La demande en mariage.

X

Le mariage est fixé pour le mois d’août. La construction de la maison de Lambert et d’Elisabeth. Les noces. La reprise de la guerre. L’ordonnance de Paul de Maisonneuve.

XI

Lambert Closse s’établit dans sa maison, avec sa femme, et Dupuis prend la direction de la petite garnison.

XII

Mais ce n’est pas tout de se battre contre les sauvages, lui disait-il alors, il faut attaquer la forêt. Défricher, labourer, semer, c’est la noblesse de la main de l’homme. C’est presque aussi beau que de porter le drapeau.” (p. 285)


XIII

Démonisation des Iroquois: “L’approche de ces ennemis, - qui poussaient la cruauté jusqu’à faire rôtir les enfants à la broche, - jeta partout l’épouvante.” (p. 287)

Le major Closse travaillait nuit et jour à fortifier sa demeure. Chacun s’ingéniait à en faire autant; mais il y avait bien peu de maisons en état de soutenir un siège à Villemarie; et la population, femmes et enfants compris, ne s’élevait encore qu’à trois cent soixante-douze âmes.” (p. 288)

Le déséspoir des colons: “Humainement parlant, c’en est fait de la Nouvelle-France, je le sais, je le vois, et pourtant j’espère toujours que la Vierge va nous secourir.” (p. 288)

XIV

Immolation” – terme religieux qui apparaît fréquement dans le récit.

Daulac propose d’aller se battre contre les indiens, au lieu d’attendre. Il a seize compagnons.

XV

Le 18 avril 1660, l’attaque est décidée.

Le prêtre, tenant le pain de l’éternelle vie, descendit les degrés de l’autel, et s’approcha de la balustrade où les partants étaient agenouillés. Alors la voix de Daulac s’éleva douce, assurée. Avec un accent qui fit frémir les plus fermes cœurs, le jeune commandant jura de combattre jusqu’à la mort, de ne jamais demander de quartier. Il jura par les souffrances du Christ, par son sang répandu jusqu’à la dernière goutte: et, à l’exception d’un seul qui se sentit faiblir et se retira, les seize autres firent le même serment. Puis, ils reçurent la sainte communion que le prêtre leur donna avec les paroles usitées pour les mourants.” (p. 292-293)

XVI

Lambert Closse souffre de ne pas pouvoir partir se battre contre les Iroquois.

XVII

Après un combat, trois des colons sont morts.

XVIII

La troupe des colons est refaite.

XIX

Tristesses d’amour.

XX

Les Iroquois se retirent. Les suplices des abbés.

Lambert à Elisabeth: “Ecoutez-moi, mon aimée. Le commencement de l’année m’inspire des pensées sérieuses, et il y a des choses que je veux vous dire ce soir… Nous sommes ici pour la gloire de Dieu, vous le savez; vous savez que pour cette cause-là, il est toujours doux et glorieux de mourir. Souvenez-vous-en, si je suis tué l’un de ces jours, ne vous abandonnez pas à la douleur. Les morts ne sont pas des anéantis… Là-haut, je vous protégerai mieux que sur la terre. Si nous nous retrouvions avec tant de bonheur pour quelques heures dans notre pauvre maison, que sera donc le revoir dans le ciel!” (p. 307)

XXI

Elisabeth a la prémonition de ne plus revoir son mari.

Anita, la Huronne, lui apporte des nouvelles de son mari.

XXII

Lambert a été frappé par une balle dans la tête.
Encore!

dimanche, septembre 03, 2006

Le pluriel des noms (exercices) (I)

1. Formez le pluriel des noms suivants:

un bijou – un vitrail – un carnaval – un pneu – un Andalou – un tableau – un général – un coucou – un noyau – un émail – un caillou – un bal – un cou – un feu – un chacal – un clou – un corail – un joujou – un vantail – un chandail – un jeu – un festival – un détail – un genou – un maréchal – un hibou

2. Mettez au pluriel les noms en italique:

a) Une pile de chandail épais attendait l’hiver. Un grand silence régnait sur le village, percé seulement par les cris des hibou. Mes voisins donnent fréquemment des dîners et des bal. Les chacal du Zoo se sont habitués à leur vie de prisonniers. Les bateau avançaient dans des chenal étroits encombrés de corail. A grand bruit on tirait les verrou, les vantail lourds craquaient.

b) Jean est à l’aise dans sa veste à carreau. Roger porte des col couverts et de grands chandail de cachemire. Ses cheveu, comme ses œil, sont très noirs. Elle apporta son coffret à bijou pour en choisir un. Berthe lui remit une liste de cadeau qu’il devait acheter pour sa famille. Des chou, il en avait beaucoup mangé dans cette saison. Il faudra acheter des clou, nous n’en avons plus.

c) Elle fit son choix de plusieurs chapeau également jolis. Les enfants jouaient sur un tas de caillou. Un groupe de touristes admiraient les vitrail de l’église. Il n’en avait sur lui que quelques sou. Marc se rappelle les moindres détail de cette histoire. Il ferma les portes et mit les verrou. Les enfants s’amusaient comme des fou avec leurs petits jeu de guerre.

d) Elle se pencha pour allumer les fanal blancs qui bordaient l’allée sur chaque flanc. Ils s’assirent dans le salon, un plaid sur les genou. Il y avait tant d’années depuis cette visite qu’il ne parvenait pas à reconnaître les lieu. Les marais étaient coupés en tous sens par un réseau de petits canal creusés par la marée. On donnait souvent des bal dans cette vieille maison. Elle réfléchit en regardant les eau du lac.

3. Trouvez le pluriel des noms entre parenthèses:

a) Le garçon faisait de petits (adieu) à sa mère. Les enfants avaient organisé des (jeu). J’avais un livre ouvert sur mes (genou). Ces (cadeau) comblaient de joie l’enfant. C’était une belle chapelle aux (vitrail) bleus et rouges. Quelques fêtards font crisser leurs (pneu) en accélérant à fond. La rivière coulait sur un large lit de (caillou). Les soldats furent surpris entre deux (feu). Des (portail) massifs cachent cette villa.

b) Janine courait les magasins pour trouver des (bijou), des (chaussure), des (sac) à main, des (chapeau). A (genou), il balayait le parquet entre les (pied) du divan. On voyait de temps en temps quelques (épouvantail) agités par le vent. Le déjeuner était formé d’une tranche d’agneau froid et deux (morceau) de pain. Le boulevard était éclairé, ça et là, par les (feu) de signalisation. Elle se mit à enfoncer des (clou) dans le mur.

c) Le corsage de sa robe était brodé de petits (cristal) bleus et de perles. Le train roule doucement, avec un bruit d’(essieu) monotone. Du train, on voyait les vignes étalées sur les (coteau). Elles entrèrent, chargées de lourds (plateau). Nous admirions leurs (cou) droits. Le peintre revint avec toile et (pinceau) et s’absorba immédiatement dans son travail. Des bonnes promenaient des nourrissons dans de somptueux (landau). Elle ouvrit les (rideau) de la fenêtre.

4. Ecrivez les noms suivants au singulier:

les puits; les journaux; les tapis; les accès; les drapeaux; les propos; les signaux; les émaux; les bocaux; les cadeaux; les brebis; les métaux; les cailloux; les tribunaux; les excès; les bras; les joujoux; les bouleaux; les genoux; les verrous.

5. Même exercice:

les discours; les châteaux; les soucis; les émaux; les poux; les totaux; les chevreaux; les secours; les poids; les fermaux; les logis

6. Ecrivez les noms suivants au pluriel:

le gaz; la souris; la voix; un enclos; le tapis; la brebis; le succès; le velours; un puits; une noix; la perdrix; le nez; le tas; un époux

7. Mettez au pluriel les noms en italique:

a) La ville organisait des bal en l’honneur de la victoire. Il avait réuni une riche collection d’émail. Les lampes éclairaient les étal des marchands. Elle était incapable de se rappeler les détail de la conversation. Le tonner fit trembler les vitrail de l’église. Cet archipel est formé d’îles de corail.

b) Il fit entrer son ami et tira les verrou. Il y avait là les jeunes filles qu’il connaissait, avec des bracelet, des éventail qu’elles étrennaient. C’est une salle idéale pour les récital intimes. Ils étaient venus en pantalons et chandail bleus. Ce journaliste écrit vite ses éditorial.

c) Je viens d’acheter une botte de poireau. Nous avons traversé une forêt de bouleau. Les nouveaux joujou firent un grand plaisir au petit Alain. Plusieurs trou sur la façade de l’immeuble attestaient les combats qui avaient eu lieu dans la zone. Les journal du soir venaient de paraître.

d) Aussitôt rentrée, Claire mit ses bijou dans le coffret. Apporte-moi la boîte à clou, lui dit son père. Noël approche, il faut penser aux cadeau. Plusieurs bocal de confiture attendaient l’hiver. Tous les soupirail de la cave étaient ouverts. Il aurait dû tenir compte des signal qu’il avait reçus dans cette affaire.

e) Elle m’a montré plusieurs chapeau, mais je n’ai pu me décider. Lise n’a que des rideau blancs dans toutes les pièces. Tous les bail ont été renouvelés dans notre immeuble. Le suspect était désormais sous les verrou. L’auto s’était engagée dans une allée pleine de caillou. Ma fille adore les bal. Les ouvriers étaient en sarrau bleus.

8. Transformez les phrases suivants en les mettant au pluriel:

Il a participé au festival. Elle a prêté son secours à son rival. Son enfant avait un nouveau joujou. Elle a sorti son éventail car il faisait chaud dans la salle. Quel beau château j’ai pu visiter dans cet endroit! Je dois acheter un pneu pour ma voiture.

9. Mettez au singulier:

les métaux; les mois; les pays; les coraux; les renards; les eaux; les bois; les coteaux; les trous; les émaux; les vantaux; les pals; les rails; les portails; les bourgeois; les licous; les avis; les procès; les logis; les rameaux; les palais; les pneus; les aulx; les sarraus; les écriteaux; les matelas; les bocaux; les radis; les secours; les succès; les moineaux; les gaz;

10. Ecrivez au singulier les noms entre parenthèses et modifiez les phrases si nécessaires:

a) (Les os) de (ces poulets) sont tendres. (Les nouveaux logis) de (mes copains) sont beaux et confortables. Après avoir quitté le Zoo, nous entendions encore, de loin, (les rugissements des lions). Il voulait arracher (les vis) de la table. On entendait (les chants) (des coucous) dans (les taillis).

b) (Les portes) de la maison avaient (des cadenas) et (des verrous). Je n’aime pas (les choux) et (les radis). (Les oasis) des (déserts) sont un vrai bonheur pour (les caravanes). (Les Andalous) sont fiers de leur province. (Les enfants) jouent avec (des toupies) et (des cerceaux).

11. Ecrivez correctement les noms entre parenthèses:

Les (travail) de la conférence ont duré trois jours. Quels (beau) (vitrail) a cette cathédrale! Il avait dénoncé les (bail) avec ses locataires. J’ai vu de nouveaux (chandail) au magasin. Le film montrait de belles colonies de (corail). C’était une belle porte à deux (vantail).

12. Mettez ou pluriel les noms entre parenthèses, afin de compléter les phrases suivantes:

(aïeul) Les … de Catherine ont aimé son fiancé dès qu’ils l’ont vu, et ils ont donné sur-le-champ leur accord pour le mariage de leur petite-fille. Cette belle tradition est assez vieille, elle vient de nos …, et la région la respecte.

(travail) Les … aux champs commencèrent tôt ce printemps-là. Les … des maréchaux-ferrants servent à ferrer les chevaux, entre autres.

(œil) Cette grande maison a plusieurs … -de-bœuf. Il lui avait parlé entre quatre … sans témoin. Des … -de-chat étaient exposés à la devanture du joailler.

(ciel) L’aviateur avait volé sous presque tous les … de la planète. Ce peintre paysagiste peint des … d’une grande beauté.

13. Complétez les phrases ci-dessous par un des mots indiqués en tête de chaque phrase et faites l’accord des déterminants:

(autorité, autorités) Marc est … en matière de droit civil. … ont organisé les cérémonies d’anniversaire de leur ville.

(bien, biens) Vos paroles consolatrices ont fait … à cet homme malheureux. On ne peut s’approprier rien de tout cela, (c’est, ce sont) … public(s).

(bonté, bontés) Cette femme est connue pour …, elle aide tous ceux qui ont recours à elle. Jeanne remercia la vieille dame pour … qu’elle lui avait faite(s).

(centre, cendres) Quand il arriva au bout de son cigare, il en écrasa … d’un geste bref. … de ce haut personnage repose(nt) dans sa ville natale.

(ciseau, ciseaux) Ma coiffeuse manie … avec adresse. Nous avons trouvé le sculpteur dans son atelier, travaillant l’immense bloc de pierre de (son, ses) …

(comble, combles) Cette maison est un bâtiment de pierre sans étage, avec des chambres aménagées sous … C’était leur plus grande soirée depuis longtemps, et toute la famille était de l’enthousiasme.

(cuivre, cuivres) J’ai de beaux objets en … Ce morceau de musique accorde une place importante (au, aux) … de l’orchestre.

(curiosité, curiosités) Cet étudiant veut tout savoir sur le sujet qu’il est en train de développer. (sa, ses) … lui (fait, font) consulter toute une bibliothèque. Le vieux monsieur est un collectionneur passionné, il a accumulé dans sa maison toute sorte de …

(eau, eaux) Qu’est-ce que vous prenez, du vin? – Non, de(s) …, s’il vous plaît. Il va (à l’, aux) … chaque année, et sa santé s’améliore.

(effectif, effectifs) Il pouvait disposer de six cent hommes, en rassemblant (tout, tous)… de la police. La jeune recrue ignorait complètement quel(s) étai(en)t … d’une compagnie.

(effet, effets) Elle attendait de jouir de … de sa révélation. Guy fourra (son, ses) … dans l’armoire et la ferma.

(fer, fers) Ils se mirent à marquer le bétail au(x) … rouge(s). Marie vient d’acheter (un, de) nouveau(x) … à repasser, moderne(s). Elle a eu un accouchement très difficile, avec … Etre dans … signifie être esclave ou prisonnier.

(gaieté, gaietés) Jacques est invité partout. (sa, ses) … le rend(ent) sympathique. Les soldats se réunissaient à la fin de la semaine pour prendre part (à la, aux) … du régiment.

(générosité, générosités) Par le don qu’il vient de faire, Bertrand a fait preuve de … J’aime faire … et voir le plaisir que cela produit aux gens.

(grâce, grâces) Ces deux dames se font … La fille d’Evelyne a beaucoup de …, pour ne plus parler de sa beauté. De …, cessez de crier!

(intelligence, intelligences) … de cet élève est reconnue par ses professeurs. L’agent nous … dans cette ville. Cet acteur a (une, des) grande(s) … de la scène.

(jumelle, jumelles) Il observait le spectacle à travers une paire de … Elle sortit, accompagnée de sa sœur …

(lunette, lunettes) En montant sur cette tour, on peut observer, au bout (de, d’une) longue(s) …, les secrets des étoiles. Il chaussa (sa, ses) … à monture de métal.

(raison, raisons) Vous avez …, ma copie a de fautes assez graves. J’ai (ma, mes) … de ne pas répondré à cette question.

(reste, restes) Elle demeura un moment immobile devant … de ce repas. Voici l’argent, gardez …

(vacances, vacances) Nous aurons … prolongée(s) cette année, les cours reprendront plus tard. Il y a … au gouvernement: un ministre a été renvoyé pour corruption.

(vue, vues) Ils s’étaient réunis après une longue absence et avaient échangé leur(s) … sur la vie. Elles étaient venues admirer … qu’on avait de ce plateau. Ces gens n’ont que leurs intérêts en …


Solutions:

1) des bijoux; des vitraux; des carnavals; des pneus; des Andalous; des tableaux; des généraux; des coucous; des noyaux; des émails (émaux); des cailloux; des bals; des cous; des feux; des chacals; des clous; des coraux; des joujoux; des vantaux; des chandails; des jeux; des festivals; des détails; des genoux; des maréchaux; des hiboux;

2. a) chandails; hiboux; bals; chacals; bateaux; chenaux; coraux; verrous; vantaux;

b) carreaux; cols; chandails; cheveux; yeux; bijoux; cadeaux; choux; clous;

c) chapeaux; cailloux; vitraux; sous; détails; verrous; fous; jeux;

d) fanaux; genoux; lieux; canaux; bals; eaux;

3. a) adieux; jeux; genoux; cadeaux; vitraux; pneus; cailloux; feux; portails;

b) bijoux; chaussures; sacs; chapeaux; genoux; pieds; épouvantails; morceaux; feux; clous;

c) cristaux; essieux; coteaux; plateaux; cous; pinceaux; landaus; rideaux;

4. puits; journal; tapis; accès; drapeau; propos; signal; émail; bacal; cadeau; brébis; métal; caillou; tribunal; excès; bras; joujou; bouleau; genou; verrou

5. discours; château; souci; émail; pou; total; chevreau; secours; poids; fermail; logis;

6. gaz; souris; voix; enclos; tapis; brébis; succès; velours; puits; noix; perdrix; nez; tas; époux;

7. a) bals; émaux; étals; détails; vitraux; coraux;

b) verrous; bracelets; éventails; récitals; chandaisl; éditoriaux;

c) poireaux; bouleaux; joujoux; trous; journaux;

d) bijoux; clous; cadeaux; bocaux; soupiraux; signaux;

e) chapeaux; rideaux; baux; verrous; cailloux; bals; sarraus;

8. Ils ont participé aux festivals. Elles ont prêté leurs secours à leurs rivaux. Ses enfants avaient de nouveaux joujoux. Elles ont sorti leurs éventails car il faisait chaud dans la salle. Quels beaux châteaux nous avions pu visiter dans ces endroits! Nous devons acheter des pneus pour nos voitures.

9. métal; mois; pays; corail; renard; eau; bois; coteau; trou; émail; ventail; pal; rail; portail; bourgeois; licou; avis; procès; logis; rameau; palais; pneu; ail; sarrau; écriteau; matelas; bocal; radis; secours; succès; moineau; gaz;

10. a) L’os de ce poulet est tendre. Le nouveau logis de mon copain est beau et confortable. Après avoir quitté le Zoo, j’entendais encore, de loin, le rugissement du lion. Il voulait arracher le vis de la table. On entendait le chant du coucou dans le taillis.

b) La porte de la maison avait un cadenas et un verrou. Je n’aime pas le chou et le raidis. L’oisis du désert est un vrai bonheur pour la caravane. L’Andalou est fier de sa province. L’enfant joue avec une toupie et un cerceau.

11. les travaux; beaux vitraux; les baux; chandails; coraux; vantaux;

12. aïeuls – aïeux;
travaux – travails;
œils – yeux – œils;
cieux – ciels;

13. une autorité; les autorités;
du bien; ce sont des biens publics;
sa bonté; les bontés… faites;
la cendre; les cendres;
les ciseaux; son ciseau;
des combles; au comble;
en cuivre; aux cuivres;
sa curiosité fait; curiosités;
de l’eau; aux eaux;
tous les effectifs; quel était l’effectif;
Encore!