mardi, juin 26, 2007

Nouvelle pédagogie de la phonétique


1. Quelques considérations sur le caractère systématique de la langue

La langue est un système de signes qui reflète un système d’idées. Les éléments qui composent une langue sont: la phonétique, le vocabulaire et la grammaire.

L’enseignement d’une langue étrangère implique, dans l’étape initiale, l’acquisition d’une prononciation correcte. Si l’élève a une bonne prononciation dès le début, cela veut dire qu’il aura une motivation puissante pour continuer l’étude de la langue, en découvrant de nouvelles notions. S’il ne réussit pas à prononcer comme il faut, il aura un grand complexe qui peut se manifester sous la forme d’un refus de s’exprimer à cause de l’inhibition.


2. Phonétique et phonologie

La phonétique étudie tous les sons émis par le gosier humain.

La phonologie a comme objet les rapports fonctionnels qui existent entre les différents phonèmes d’une langue.

Le phonème est un élément sonore déterminé par les rapports qu’il entretient avec les autres sons d’un mot.

Le nombre des sons dans une langue est assez réduit, mais les variations phonologiques sont très nombreuses.

Pour qu’un élève comprenne un phomème, il faut le faire prononcer par opposition (cela favorise la discrimination auditive): du - doux, du pain – deux pains, du verre – dix verres, etc.

La stratégie d’enseigner une langue qui vise d’abord et surtout la communication orale doit comprendre:
a) la perception et l’identification des mots et des sons d’après l’ouïe;
b) la capacité de reproduire et puis d’utiliser les mots et les sons dans des phrases simples, en respectant le rythme et l’intonation;
c) le passage à la méthode écrite, quand l’oreille a été déjà formée et les signes graphiques ne peuvent plus avoir une influence négative.

Afin d’obtenir une perception auditive différentielle, le professeur doit utiliser le transfert des sons communs, combattre l’interférence des sons voisins et enseigner les sons différents.

Dans la période initiale de l’étude d’une langue étrangère, on peut remarquer la fréquence des fautes de prononciation chez les élèves. Le professeur doit corriger toute prononciation défectueuse. Il doit éviter de répéter les fautes de ses élèves.

La phonétique corrective est basée sur l’opposition fonctionnelle des sons voisins.

Le professeur doit utiliser des enregistrements audio. A l’aide de la mémoire de la bande magnétique, après plusieurs écoutes, les élèves se rendront compte et ils apprendront la forme correcte du mot ou de l’expression en question.

Pour encourager et stimuler les élèves timides, le professeur peut pratiquer la répétition en chœur. Ce procédé est efficace surtout au niveau débutant, mais il peut être employé également plus tard pour les avancés.

L’enseignement de la phonétique doit faire partie de chaque leçon, doit être une préoccupation permanente du professeur de français.
Encore!

lundi, juin 25, 2007

L’enseignement de l’orthographe


1. Considérations générales

Les élèves qui lisent mal ou qui lisent peu n’ont pas une bonne orthographe.

L’exercice orthographique par excellence est la dictée. Le professeur ne peut pas l’ignorer.

L’orthographe représente l’un des plus importants moyens pour la consolidation des connaissances phonologiques, lexicales et grammaticales qui se trouvent à la base du mot écrit.

Le professeur doit prouver de la patience et du tact pédagogique, en allant du simple au complexe, du facile au difficile, selon l’âge des élèves et leur niveau de connaissances en français.

Les sept principes de la rénovation pédagogique de l’orthographe sont:
- adapter les acquisitions orthographiques aux possibilités des élèves;
- exploiter des situations motivées de communication;
- assurer d’abord de bons automatismes par le recours à l’analogie;
- recourir ensuite seulement à la réflexion “raisonnante”, c’est-à-dire à l’analyse et aux règles;
- individualiser les tâches;
- réviser les acquisitions;
- pratiquer une pédagogie de la réussite.

Le recours à l’analogie auditive, puis graphique, c’est un exercice de type formel, mais très efficace.

L’enseignement de l’orthographe exige la pratique du travail individualisé et le recours à divers fichiers.


2. La pratique de l’orthographe

L’orthographe d’usage vise le cahier des familles orthographiques. Un tel cahier a dans sa structure des listes de mots qui ont été regroupées par familles orthographiques, étant établies par les élèves durant l’année scolaire. C’est un travail de découverte faite par l’enfant, qui ne doit pas être imposé dès le début de l’année par le professeur. Ex: les mots à s final muet, des mots à t final muet, des mots à lettres muettes à l’intérieur d’un mot, des mots à lettre initiale muette, des mots à consonnes doubles.

Les principes de l’orthographe grammaticale visent:
- la priorité de l’expression orale;
- le rôle important de l’analogie;
- la place de l’induction, le recours ultérieur à la réflexion;
- l’individualisation des acquisitions.


3. Priorité de l’expression orale

La tâche des professeurs qui sont de vrais maîtres en matière d’orthographe grammaticale est d’apprendre aux élèves à bien parler.

Le rôle de l’analogie
L’analogie permet de bien orthographier les terminaisons des mots, sans connaître aucune règle d’accord.

La place de l’induction
Après deux années d’usage intuitif des faits grammaticaux, l’élève sera capable d’accéder au stade de leur généralisation. Plus tôt, l’induction serait prématurée.

L’individualisation des acquisitions
Il est bon de recourir au système du travail individualisé qui respecte le rythme personnel d’assimilation de chaque élève. A cette fin, il est recommandable d’utiliser les batteries de fiches d’exercices d’initiation et les fiches de découverte.

Le matériel d’orthographe grammaticale comprend
- les exemples-types;
- le cahier des “ensembles” ou les affiches murales collectives;
- le fichier d’orthographe.


4. Les exercices d’orthographe

1. Considérations générales
Ce sont des exercices très variés, qui ne se limitent pas à la dictée.

Le professeur doit savoir se servir de la dictée pour mettre en valeur les possibilités réelles de l’élève et non pas pour lui prouver qu’il est incapable de se débrouiller.

2. Les exercices d’orthographe
Il y a trois types d’exercices:
- collectifs,
- en équipes,
- individualisés.

La dictée préparée
Ce qu’il ne faut pas faire:
- étudier chaque mot du texte, toutes les difficultés, tout mettre en couleurs;
- pendant la préparation, il ne faut pas se limiter à faire copier le texte par les élèves, une activité mécanique, sans aucune logique si elle n’est pas dirigée par le maître;
- ne jamais faire préaprer la dictée à la maison.

Ce qu’il faut faire:
- s’il s’agit d’une préparation collective, on peut choisir trois ou quatre difficultés, en faisant, en même temps, des analogies;
- s’il s’agit d’une préparation individuelle, les questions écrites au tableau noir seront un vrai guide pour l’élève, l’invitant à classer les mots ou les expressions. Le professeur doit insister seulement sur l’essentiel. Le texte écrit au tableau noir présente un inconvénient: pendant la préparation de la dictée, certains enfants photographient les mots en les reproduisant mécaniquement, sans acquérir de bons automatismes orthographiques.

2. La dictée proprement-dite
Le professeur commence par relire le texte en entier. Puis, il dicte chaque phrase, par groupes de mots grammaticaux, liant le sujet et le verbe, le nom et le qualifiant du groupe nominal dans les mêmes émissions vocales.

Le professeur ne dicte qu’une seule fois chaque partie de la phrase; il ne répète jamais.

La dictée du texte achevée, le maître la relit et accorde ensuite à ses disciples quelques minutes de réflexion avant de faire procéder à la correction des cahiers.

Pendant la dictée d’un texte, le professeur doit éviter de faire des observations plus ou moins intempestives quant à ses élèves. Il ne dira jamais: « Silence! On dicte! » pour ne pas disperser leur attention.

Le professeur peut rester immobile, face à l’auditoire, de manière que tous les élèves entendent bien distinctement le texte dicté. Les déplacements du maître peuvent intimider certains élèves.
L’étape collective
Ce qui n’est pas recommandable:
- recenser publiquement les erreurs de chaque enfant;
- procéder à l’échange des cahiers;
- faire épeler par les enfants, à tour de rôle, tous les mots du texte.

Ce qui est recommandable:
Le cahier fermé, chaque élève suit au tableau noir la séance collective d’explications. On rappelle telle liste analogique, ou telle phrase modèle qui sert d’exemple pour une forme graphique considérée. A propos de certaines situations particulières, on demande aux enfants d’évoquer des cas semblables.

Les élèves doivent fermer les cahiers pendant la correction collective, pour être obligés à participer à cette activité. Dans le cas contraire, chacun est préoccupé de découvrir ses erreurs personnelles et ne profite pas du travail commun.

L’étape individuelle
Comporte deux temps:
- correction personnelle immédiate;
- exercice de “renforcement”.

La correction personnelle immédiate
Chaque élève ouvre son cahier, recense les erreurs et les rectifie à la suite de la dictée de la manière suivante:
- dans la situation d’un mot mal orthographié, l’enfant l’écrit sous la forme correcte. Il écrit également ce mot sur un papillon qu’il glisse dans sa “boîte à mots”;
- dans la situation d’un accord incorrect, l’élève écrit le terme dans les deux formes grammaticales correspondantes: masculin et féminin, ou singulier et pluriel.

L’exercice de renforcement
A propos d’une erreur d’orthographe commise dans la dictée, chaque élève effectue un exercice, soit en utilisant les fiches de contrôle, soit en recourant à son manuel d’orthographe ou de grammaire.

La dictée de contrôle
Elle ne comporte pas de préparation. Pendant la dictée, l’élève ne reçoit aucune aide.

La dictée de contrôle se déroule de la manière suivante: le professeur lit le texte à haute voix, en dictant successivement les groupes de mots sans les répéter. Puis, le texte dicté, le maître le relit à haute voix. Les élèves disposent de quelques minutes pour relire la dictée silencieusement. Ensuite, on procède à la correction.

La copie
C’est un exercice traditionnel, qui ne suppose pas une méthode particulière.

La copie mentale
Cet exercice apprend aux élèves à copier un groupe de mots, voire une phrase, sans regarder le modèle qui figure au tableau noir. Après quelques secondes d’une observation silencieuse par tous, afin d’assurer une bonne mémorisation du modèle, le maître essuie le tableau noir ou el retourne. En silence, les enfants écrivent et le professeur n’intervient pas à ce moment. Le modèle étant de nouveau sous les yeux des élèves, on procède à la correction de la phrase.

La copie mentale peut être pratiquée cinq à dix minutes chaque jour. Elle est très utile, car les enfants apprendront à copier un texte par groupe de mots. C’est un excellent exercice d’apprentissage de l’orthographe, car il stimule la capacité d’attention soutenue des élèves.

Les textes à compléter
C’est un exercice à être réalisé collectivement ou par équipes. Il comporte plusieurs phases:
- le travail personnel (5-10’);
- la mise au point au niveau de l’équipe (discussions, recherches dans les manuels d’orthographe et des dictionnaires);
- le bilan au niveau du groupe-classe, chaque équipe apportant sa contribution à la mise au point collective.

La dictée commentée
Dès le début, les élèves doivent être prévenus sur les modalités de cet exercice.

Tout d’abord, le maître lit le texte, ensuite il pose une ou deux questions sur le sens général du passage choisi. Puis, le professeur fait une deuxième lecture de la première phrase du texte. Les élèves seront invités à faire un commentaire concernant les mots ou les expressions qui se trouvent dans le texte. On continue le commentaire et les élèves feront quelques remarques. A la fin, après avoir fini le commentaire, le maître relit la première phrase, un élève la répète à haute voix d’une manière claire et distincte. Au signal sonore magistral, chaque élève prend son stylo et travaille en silence, en reproduisant la phrase sur le cahier. Pour ce qui est le reste du texte, on peut appliquer la même procédure.

Il n’est pas recommandable de commenter l’orthographe d’un mot pendant que les élèves écrivent le texte.

La dictée commentée présente un avantage extraordinaire: à l’aide de celle-ci, les élèves seront habitués à effectuer mentalement les opérations nécessaires en vue d’une bonne acquisition de l’orthographe.

L’auto-dictée
Cet exercice peut s’effectuer soit en étudiant le texte à la maison, soit en l’étudiant en classe.

La première conception suppose que les élèves apprennent chez eux, le soir, un texte de quelques lignes dans leur manuel de lecture. Ils étudient telle forme verbale qu’ils révisent dans leur livre de grammaire à la page indiquée par le professeur. Ils copient tel mot dont la graphie est difficile. Chacun prépare le texte et ne se contente pas de l’apprendre par cœur.

Le lendemain, en silence, chaque élève l’écrit sur son cahier.

Cette façon d’employer l’auto-dictée s’adresse à des élèves qui ont “appris” à apprendre.

La deuxième conception vise un texte que les élèves ne voient pas. Le professeur le lit, en s’assurant de sa compréhension. Ensuite, on procède à l’étude de la première phrase. On fait mémoriser le texte phrase par phrase. A la fin de l’exercice, on récapitule “de mémoire” l’ensemble du texte. Le lendemain matin, le professeur le relit deux fois. Ensuite, chaque enfant le transcrit “de mémoire” sur son cahier de devoir. La correction se fait comme à l’ordinaire.

La dictée rapide
Cet exercice peut avoir plusieurs formes:
- dictée magistrale;
- dictée mutuelle;
- dictée suivie.

La dictée magistrale
Chaque jour, pendant quelques minutes, le professeur procède au contrôle des mots révisés du carnet studiométrique. Ces termes seront insérés dans des phrases orales par le maître. Chaque élève écrit seulement les mots en question. Pour chaque faute faite, l’auteur copie le terme correspondant sur un papillon qu’il place dans sa “boîte à mots”.

La dictée mutuelle
Par groupe de deux, une fois par semaine, les élèves peuvent contrôler mutuellement les acquisitions de la “boîte à mots”. Exercice de 5-10’.

La dictée suivie
C’est une variante de la dictée rapide. Le professeur ne doit pas se contenter de dicter des mots isolés. Il dicte un mot caractéristique du récit qu’il raconte. Sur une feuille, les élèves écrivent ce mot. Celui-ci ne doit pas être choisi au hasard. Il est connu par les élèves, qui doivent l’orthographier correctement.

Cet exercice se propose de contrôler les automatismes orthographiques à un moment où l’élève est particulièrement intéressé par une histoire et ne pense plus à la forme graphique des mots.

La dictée panachée
Le professeur fragmente le texte en trois parties et procède pour chacune d’elles de la manière suivante:
- première partie: dictée commentée;
- deuxième partie: dictée rapide;
- troisième partie: dictée de contrôle, ou dictée sur mesure.

Les exercices d’orthographe grammaticale
Il est bon de ne pas en abuser. La conception traditionnelle, conformément à laquelle après une leçon magistrale tous les élèves font les mêmes exercices en même temps, est contestable. En général, seuls les élèves doués sont bénéficiaires de ce travail. Ces exercices peuvent s’effectuer par chaque élève par rapport à ses nécessités.

Pour être efficace, l’enseignement de l’orthographe doit être simple, méthodique, fonctionnel.

[Source des notes: Traian Nica, Cătălin Ilie, Tradition et modernité dans la didactique du français, langue étrangère, Editura Celina, Oradea, 1995]
Encore!

mercredi, juin 20, 2007

Typologie et structure des classes de français


Chaque leçon est une unité, ayant une fonction bien déterminée.

Quand il prépare la leçon, le professeur doit tenir compte de quelques recommandations importantes:
- être constamment au courant des orientations méthodologiques modernes;
- bien connaître les programmes et les manuels;
- connaître à fond les particularités d’âge de ses élèves et aussi le niveau de leurs connaissances.

Toute classe de français comporte trois étapes importantes:
- le contrôle;
- la communication des connaissances nouvelles;
- la fixation des connaissances acquises.

Le contrôle des connaissances, qui se situe au début de la classe, permet au professeur de vérifier comment les élèves ont acquis les connaissances enseignées antérieurement et de juger l’éficacité de son enseignement.

La communication des éléments nouveaux comprend deux moments distincts:
- la présentation;
- le réemploi et l’appropriation, l’exploitation de l’acquis récent, l’intégration immédiate de cet acquis déjà connu.

La fixation des connaissances acquises sert à la création et à l’entretien des automatismes de maniement du langage.

La typologie de leçons comprend:
- Leçons d’acquisition
- Leçons de fixation
- Leçons de révision et de systématisation.

Il existe aussi des leçons mixtes. Elles se déroulent en quatre étapes:
a) contrôle du devoir et vérification des connaissances acquises au cours de la classe précédente;
b) communication des nouvelles connaissances;
c) fixation des connaissances acquises;
d) explication du devoir à la maison.


1. Modalités de travail en classe au cours des trois étapes principales d’une classe de français mixte

Le contrôle
La vérification doit être complexe et bien conduite. Elle doit établir un ordre dans les questions et les exercices de vérification.

La communication ou la transmission des nouvelles connaissances
Cette étape comprend plusieurs moments successifs:
a) la présentation – vise l’introduction orale des éléments nouveaux de la leçon;
b) l’exploitation – permet le réemploi des connaissances nouvelles dans des contextes légèrement différents de ceux dans lesquels on a fait la présentation;
c) la fixation – assure l’assimilation défintiive et crée les automatismes linguistiques.


2. La classe de communication de nouvelles connaissances

Dans ce type de leçon prédomine l’exposé du nouveau matériel, la vérification et la fixation étant plus limitées.

La structure d’une telle leçon est la suivante:
- la réactualisation, par la conversation, des connaissances antérieures sur lesquelles se basera le nouveau matériel enseigné et l’énoncé du sujet;
- l’ample communication du nouveau matériel par divers moyens: exposé, démonstration, conversation;
- la fixation des principales données de la leçon à l’aide des schémas au tableau noir;
- le devoir pour la prochaine classe et son explication.

Pendant ce type de classe, il y a des exigences:
- l’exposé ne doit pas être fait sans interruption, mais par dialogue;
- le schéma au tableau noir sera complété au fur et à mesure de l’exposé;
- les mots nouveaux seront expliqués au moment où ils apparaissent dans l’exposé.


3. La classe de fixation et de formation des habiletés et des habitudes

Son principal but est d’appliquer dans la langue parlée et écrite des connaissances grammaticales et lexicales acquises par la formation des habiletés et des habitudes. C’est un type de classe qui opère avec le matériel déjà connu, qui doit être consolidé.

Il y a plusieurs variantes de classes de fixation:
a) classe de fixation et de formation d’habitudes et d’habiletés d’expression orale;
b) classe de fixation et de formation d’habitudes et d’habiletés d’expression écrite;
c) classe d’interprétation d’un texte littéraire.
d) classe de révision et de systématisation des connaissances, avec les variantes:
1) classe de révision introductive, utilisée surtout au début de l’année scolaire;
2) classe de révision périodique, qui prépare d’habitude les épreuves écrites trimestrielles;
3) classe de révision finale, se situant à la fin des trimestres et à la fin de l’année scolaire.

Les classes de révision visent à la systématisation des connaissances et à une évaluation cumulative. Pour réaliser ces classes, le professeur doit respecter les principes:
- le principe de la systématisation et de la continuité qui se reflète dans l’organisation de la classe, en tenant compte des rapports logiques qui existent entre les différentes parties du matériel à réviser.
- le principe de l’intuition, d’habitude réalisé par l’utilisation des moyens techniques-visuels: schémas, graphiques, craie de couleur, films, diapos, etc.

e) classe de vérification – classe d’évaluation périodique des connaissances des élèves

Pour que la classe soit productive, le professeur doit finir par un commentaire évaluatif des épreuves écrites, en relevant les fautes typiques générales et individuelles et en expliquant les causes qui ont mené à les faire et comment on peut les éviter.

[Source des notes: Traian Nica, Cătălin Ilie, Tradition et modernité dans la didactique du français, langue étrangère, Editura Celina, Oradea, 1995]
Encore!

Méthodes et procédés utilisés dans l’enseignement du français, langue étrangère


1. Méthodes et procédés traditionnels

1.1. La méthode “grammaire-traduction”

Méthode spécifique à la didactique du français au XIXème siècle, basée uniquement sur la traduction et les analyses grammaticales. Elle ne crée pas des parleurs, parce qu’elle néglige complètement les compétences de communication orale.


1.2. La méthode naturelle ou directe

Cette méthode interdisait le recours à la langue maternelle dans le processus de l’enseignement du français. Elle prétendait faire apprendre une langue par la même voie naturelle que l’on constate à l’acquisition de la langue maternelle. Elle ignorait systématiquement la grammaire.

Dernièrement, les spécialistes ont adopté une méthode mixte, qui se base sur des considérations psycho-pédagogiques, acceptant l’analyse contrastive, la traduction et l’explication directe, lorsque la situation s’impose.


2. Méthodes et procédés modernes

Il y a quatre groupes de méthodes:
a) Méthodes informatives-participatives: l’exposé, la démonstration, la conversation, le dialogue linguistique et/ou littéraire du texte, l’approche du texte de civilisation;
b) Méthodes informatives-non-participatives: l’exposé, l’explication, le récit;
c) Méthodes formatives-participatives: l’apprentissage par l’action et par le jeu, par la recherche individuelle, par la découverte;
d) Méthodes formatives-non-participatives: l’exercice, l’enseignement programmé, l’algorithme.

La conversation
C’est la méthode la plus utilisée dans l’enseignement des langues modernes. C’est une méthode stimulative, qui peut être utilisée dans tous les moments d’une leçon et dans tous les types de leçons:
- à l’étape de vérification des connaissances lexicales ou grammaticales;
- à l’étape de transition à la leçon nouvelles par des questions posées aux élèves pour assurer la continuité entre les connaissances acquises et celles nouvelles;
- à l’étape de communication de nouvelles connaissances;
- dans l’explication du phénomène grammatical;
- à l’étape de fixation des connaissances nouvelles, lorsque le professeur peut demander aux élèves de formuler des réponses originales.

La conversation a plusieurs fonctions:
- une fonction euristique, qui fait que les élèves apprennent en découvrant eux-mêmes les phénomènes;
- une fonction d’explication, d’élucidation, de synthétisation et d’approfondissement des connaissances;
- une fonction de formation d’habitudes d’expression orale;
- une fonction d’évaluation et de contrôle.

Les conditions recquises pour que la conversation soit efficace:
1) La question doit être adressée à toute la classe ou à tout le groupe. Le professeur doit accorder le temps nécessaire aux élèves de formuler leur réponses. On n’admet pas les réponses en choeur.
2) Les questions formulées doivent être claires, précises et elles doivent avoir une seule réponse. Elles doivent être brèves, concrètes et surtout logiques, afin d’habituer les élèves à raisonner et à enchaîner leurs idées d’une façon cohérente.
3) Il faut habituer les élèves à comprendre et à utiliser les constructions interrogatives.
4) Le professeur doit écouter attentivement et patiemment les réponses des élèves et corriger les éventuelles erreurs, à la fin et avec le concours de la classe.
4) Le professeur doit éviter de répéter systématiquement les questions et même les réponses des élèves, pour ne pas affaiblir leur attention et pour ne pas rompre les rythme du dialogue.

L’exposé
C’est une méthode utilisée surtout pour systématiser un problème ou un groupe de problèmes, pour présenter un courant littéraire ou des aspects nécessaires à la compréhension des faits de civilisation.

L’exposé doit respecter certaines étapes:
1. la préparation des élèves pour une participation active (le prof doit faire connaître le plan de l’exposé);
2. l’exposé ne doit pas être fait “d’un souffle” – il faut l’entrecouper de questions posées aux élèves;
3. le professeur doit vérifier si les conclusions sont accessibles aux élèves.

L’exposé doit respecter les conditions suivantes:
- choisir bien les faits à exposer de manière qu’ils soient originaux et qu’ils intéressent les élèves;
- il doit être clair, concis et accessible: fait à un degré moyen de compréhension;
- il doit avoir un caractère intuitif et émotif pour assurer la participation des élèves;
- il doit être fait dans un langage élégant et expressif.

La démonstration
C’est une méthode utilisée pour faciliter aux élèves la compréhension et l’élucidation des notions enseignées à l’aide des moyens intuitifs traditionnels (schémas, planches, tableaux) ou modernes (tableau de feutre, diapositives, films muets) de même que des documents authentiques (textes de civilisation, articles de presse, recettes de cuisine, chansons authentiques).

L’apprentissage par l’action
C’est une démarche qui repose sur une approche par le vécu. La méthode repose sur les simulations, les jeux de rôle, les dramatisations et les procès littéraires. Ces jeux sont appelés psychodrames et sociodrames. Les élèves sont naturellement très motivés pour ce type de situation.

Le débat
C’est une méthode qui porte sur un problème social ou psychologique, voire littéraire. C’est une activité de groupe, dirigée par le professeur, qui vise le développement du langage argumentatif.

Le jeu didactique
C’est une méthode utilisée pour renforcer des connaissances linguistiques: orthographe, orthophonie, grammaire, vocabulaire, développement de l’expression orale.

Les algorithmes
Il y a plusieurs catégories d’algorithmes:
- d’identification et de caractérisation;
- de manipulation de formes linguistiques;
- de composition;
- d’évaluation et de contrôle.

Ils sont utilisés surtout dans l’enseignement de la grammaire, qui s’appuie surtout sur des règles, des définitions, des schémas, etc.

La simulation
C’est une méthode employée dans la formation des futurs spécialistes, elle éveille des motivations profondes, crée l’autodiscipline. Par cette méthode on introduit les élèves dans des situations comparables à celles auxquelles ils devront faire face au terme de leurs études, on les oblige à prendre des décisions et des initiatives en leur donnant aussi la possibilité d’agir et d’affirmer à la fois leurs connaissances et leur personnalité. En impliquant les élèves, la simulation pédagogique a aussi une valeur éducative très importante.

Une exercice de simulation a quatre étapes distinctes:
1. Création de la situation.
2. Compréhension de la situation.
3. Introduction de la construction clé.
4. Fixation de la nouvelle construction par la dramatisation (le jeu de rôles).

Cette méthode a l’avantage qu’elle permet à l’élève de participer activement à une communication très proche de la réalité.

L’étude de cas
C’est une simulation à propos de laquelle les participants (élèves) confrontent leurs réflexions et adoptent une décision finale.

L’étude de cas a trois étapes:
- une étape subjective (de réactions spontanées, d’opinions divergentes);
- une étape objective (le diagnostic de cas, la recherche des arguments pour et contre);
- une étape déductive (de généralisation).

La lecture
C’est une construction et une interprétation des signes du texte, ayant une double configuration: syntagmatique ou synthétique et paradigmatique ou analytique.

La lecture à rôles a plusieurs valences éducatives par la mise en situations communicatives.

Les techniques productives
Ce sont des transformations qui visent à développer l’expression écrite et orale des élèves à partir d’un texte authentique, ou surtout de créer une compétence textuelle productive. Les plus connus exercices de ce genre sont:
- la reconstitution du texte;
- le compte-rendu de lecture;
- la réduction de texte;
- la production de texte;
- la restitution de texte.

Le texte littéraire peut être le sujet d’autres exercices de créativité:
- exercices de complètement de texte;
- exercices de variations de rôles et de variations des points de vue;
- le pastiche ou l’imitation de texte;
- le rétablissement de la ponctuation;
- exercices de variations thématiques (selon que l’accent est mis sur le personnage, le temps, le lieu ou l’action);
- exercice “Jouer avec les titres”, etc.

[Sources des notes: [Source des notes: Traian Nica, Cătălin Ilie, Tradition et modernité dans la didactique du français, langue étrangère, Editura Celina, Oradea, 1995]
Encore!

Aspects généraux de la didactique des langues étrangères


1. Définition de la méthodologie de l’enseignement du français

La méthodologie de l’enseignement du français s’occupe spécialement de trouver les moyens et les voies pour assurer un apprentissage convenable de la langue française.


2. But

Le but de la méthodologie est de mettre à la disposition des enseignants des renseignements sur les élèves, les programmes, les horaires, le matériel didactique, les méthodes et les techniques d’enseignement.


3. Les tâches de la méthodologie de l’enseignement du français

Les tâches de cette méthodologie sont:
- la réalisation d’un enseignement scientifique, systématique et progressif;
- l’adaptation de l’enseignement à l’âge des élèves et à leur psychologie;
- l’adaptation des méthodes et des procédés employés aux conditions de la classe.

Les objectifs de cette discipline se proposent exigent des professeurs de français:
- une bonne maîtrise de la langue française;
- la capacité de mettre en pratique les connaissances de français;
- une bonne connaissance de la littérature et de la civilisation françaises;
- une bonne connaissance de la psychologie et des problèmes théoriques et pratiques de l’enseignement;
- une bonne connaissance des méthodes et des techniques d’enseignement du français;
- connaître et savoir manier les auxiliaires techniques et audiovisuels.

Les bases psychologiques de l’enseignement du français langue étrangère

Il y a plusieurs catégories de langage:
- un langage oral (l’audition et le parlé);
- un langage écrit (la lecture et l’écriture);
- un langage passif (l’audition et la lecture);
- un langage actif (le parlé et l’écriture).

Le langage a un double aspect:
a) analytique, quand l’attention porte sur la forme de l’expression;
b) synthétique, quand l’attention est dirigée sur le contenu de la communication.

Le langage actif peut être:
- reproductif, lorsqu’il reproduit fidèlement quelque chose apprise auparavent (une poésie, un texte, etc.);
- productif, lorsqu’on utilise librement et d’une manière créatrice les connaissances acquises.


4. Application créatrice des principes didactiques à l’enseignement du français

Les principes didactiques fundamentaux sont:
1. le principe du développement harmonieux de la personnalité de l’élève, visant des effets formatifs et informatifs à la fois;
2. le principe de l’observation du caractère scientifique de l’enseignement;
3. le principe concernant l’accord de la théorie avec la pratique; (d’où une prépondérance de l’oral);
4. le principe de l’intuition (intuition visuelle, concrétisée par un matériel intuitif – planches, dessins, schémas, craie de couleur, etc – et intuition auditive, le seul moyen étant la prononciation nuancée du professeur, accompagnée parfois par des gestes, mimant l’action respective);
5. le principe de l’acquisition consciente et active des connaissances (ainsi, la règle de la grammaire sera formulée par une voie inductive après avoir activé l’attention des élèves et assimilé d’une manière consciente les phénomènes; le vocabulaire sera appris intégré dans des structures);
6. le principe de la systématisation et de la continuité (le professeur doit respecter la planification annuelle et trimestrielle; ses leçons doivent être systématiques, elles doivent avoir un déploiement logique, en mettant en relief les idées principales et en écartant ce qui est superflu);
7. le principe de l’accessibilité exige la gradation du facile au difficile, du simple au complexe;
8. le principe de l’acquisition solide des connaissances (exercices d’expression orale et écrite)
Pour réaliser ce principe il faut utiliser les éléments:
a) la répétition;
b) le contrôle et l’évaluation permanente des connaissances enseignées;
c) l’auto-évaluation;
d) l’exigence du professeur quant à l’exactitude des réponses des élèves.
9. le principe de la socialisation des activités didactiques.


5. Le rapport langue maternelle – langue seconde

Il ne faut pas ignorer les influences de la langue maternelle dans le processus d’acquisition d’une langue étrangère. Il est normale de constater des erreurs de prononciation, de lexique et de grammaire qui sont dues aux analogies que les petits élèves peuvent faire avec des choses connues déjà.

Les erreurs les plus rencontrées dans le cas des élèves roumains sont: la prononciation des voyelles [œ] et [y], des voyelles nasalisées, l’emploi de certains modes et temps dans les subordonnées.

Le rôle du professeur de français est celui de:
a) prévenir et combattre les influences négatives (les interférences);
b) procéder au transfert des influences positives.

Sous l’influence du roumain, les élèves peuvent faire des confusions en ce qui concerne le lexique, le genre, etc.

Pour éviter et corriger ces interférences, le professeur doit faire avec ses élèves beaucoup d’exercices jusqu’à ce qu’il les habitue à un emploi automatique et correcte et surtout il ne faut pas punir les élèves par de mauvaises notes pour de telles fautes.

Toute leçon commence par l’étape de vérification des connaissances.

Pendant l’explication de la nouvelle leçon, à l’occasion de l’enseignement du vocabulaire, la traduction sélective est admise lorsque la situation l’impose. On peut aussi recourir au roumain lorsqu’il s’agit d’une leçon plus difficile de grammaire, surtout au niveau de débutants pour éviter de charger la mémoire des élèves par des définitions et des techniques qui ne leur sont pas d’une urgente nécessité.

Quelques conclusions:
- l’utilisation de la méthode contrastive est imposée par les données psychologiques qui expliquent les particularités de l’acquisition du français à l’âge de l’adolescence;
- la contrastivité peut être utilisée avec efficacité, mais elle exige du professeur une certaine compétence linguistique et une sérieuse connaissance de la langue maternelle des élèvs et de la langue enseignée;
- l’analyse contrastive doit être utilisée non comme un but en soi, mais comme un auxiliaire précieux pour l’acquisition correcte de la langue étrangère;
- l’emploi de ce procédé contribue encore à développer chez les élèves l’esprit d’observation, en leur formant l’habitude d’établir des rapports logiques entre les phénomènes étudiés;
- la contrastivité, en tant que procédé didactique, doit avoir ses limites, vue la nécessité que les élèves doivent se dégager le plus tôt possible des influences maternelles.

[Source des notes: Traian Nica, Cătălin Ilie, Tradition et modernité dans la didactique du français, langue étrangère, Editura Celina, Oradea, 1995]
Encore!

dimanche, juin 17, 2007

Louis Pauwels, Saint Quelqu’un (notes de lecture)



Paris, Editions de Seuil, 1946.

Avant-propos de l’auteur

« Je voudrais seulement redire que le bonheur ne tombe pas entre les mains blanches. Il descend lentement sur des mains ensanglantées par de patients et redoutables travaux. Encore faut-il peut-être qu’une secrète grâce le permette.
Et dans un autre langage, que c’est la croix, même dans les religions sans Golgotha, qui fait que les fruits du Ciel sont nourrissants.
» (p. 27)

Première partie

I
Un homme travaille pour une entreprise de bétonnage. Il revient à la maison tous les deux mois, pour huit jours. Il est marié avec une femme nommée Juliette, avec laquelle il a une fille (Lucienne) et un fils (Jacquot).

Sa femme trouve une lettre dans une poche de son veston. C’est la froideur conjugale.

Attente: « J’ai l’impression qu’il est en train de se produire quelque chose d’extraordinaire. Je ne pourrais dire quoi, mais je sens que je vais changer, que ma vie changera, que tout va changer. L’extraordinaire, ce n’est pas l’histoire de la lettre. Cela, c’est un sale coup, mais il y a des milliers de ménages qui le reçoivent. Non, l’extraordinaire, c’est plus loin, plus profond, plus à venir... Je ne peux pas m’expliquer. » (p. 35)

L’homme décide de quitter sa maison: « Je vais m’en aller comme cela, sans rien emporter, comme si j’allais fermer la porte du jardin. Je ne peux pas dire si je reviendrai un jour. Tout est possible. Je sens que tout est possible. Et même des choses qui sont loin devant moi, que je devine prêtes à exister, et que je ne connais pas. » (p. 43)

IIJuliette se réveille. Elle déteste son mari, Louis, elle veut le pardonner.

« Les mots font des trous où la souffrance se précipite, comme la mer quand on creuse le sable. » (p. 46)

III
Dans un compartiment de train, puis sur le quais d’une gare. Louis a quitté sa famille.

IV
La femme de Louis: « Je le veux pour lui dire que j’ai mal, je le veux pour lui faire honte. Je le veux pour qu’on se déchire, qu’on se déteste, qu’on insulte, qu’on brise. Pour tout. Pour tout ce qui est possible. Pour que tout soit possible. Je le veux. Tout à coup, j’ai tellement de douceur! » (p. 52-53)

V
Louis: « J’ai déjà beaucoup moins peur qu’hier. Hier, après le coup du chantier, j’ai eu très peur. J’ai vu, oui, j’ai vu que je glisse, que je me suis décroché de ma vie, et que je suis tout seul, pire que seul, sans rien de moi en moi. Je glisse à l’aveuglette vers je ne sais quoi. Qu’est-ce que j’ai fait pour en arriver là? Je suis peut-être malade? C’est peut-être une maladie. Mais je ne vois pas ce que je pourrais dire au médecin. » (p. 54)

Louis revient au chantier, où il trouve quelqu’un d’autre sur son poste. Il résume sa situation: « J’ai connu Margot, plaqué mon ravai; je suis revenu à Sainte-Yvette comme si de rien n’était. Ensuite la scène à la maison. J’ai quitté la maison, j’ai quitté ma femme, j’ai quitté mes enfants. C’est pourtant vrai! » (p. 56)

Louis ressemble au héros de l’Etranger de Camus: « Quand les nuages qui me remplissent la tête s’en vont un peu, je vois ce que j’ai fait, et je vois que je suis seul. Pire que seul. On dirait que les choses qui sont moi m’ont abandonné. Je m’appelle. Ça oui, je m’appelle. Mais il n’y a rien à faire. » (p. 56)

Résumé de l’histoire avec Margot: « Non, je n’ai jamais aimé Margot. C’est une histoire qui ne compte pas. Elle est entrée à l’hôtel il y a huit jours. J’ai couché avec elle parce qu’elle était facile et que je me sentais privé. Le lendemain j’ai été malade. Ensuite... oui, je suis resté à l’hôtel avec elle sans vouloir retourner au chantier. C’est le plaisir qui m’a décidé. Mais depuis longtemps j’avais assez de cette vie d’esclave des boches. Je crois qu’elle m’a aimé. C’est tout de même une fille bizarre. Samedi dernier, le jour où, si tout avait été normal, je devais être en permission et revenir chez moi, je me suis réveillé: j’étais seul. Elle m’avait laissé une lettre. La fameuse lettre. Alors je suis parti pour Sainte-Yvette. » (p. 57)

Le dîner avec le patron de l’hôtel. Le tutoyement.

Une autre relation avec le temps: « Tout de suite (je dis tout de suite parce qu’il m’a semblé que le temps n’avais pas coulé) je me suis trouvé dans le silence, ramassé en boule dans moi-même comme un doux hérisson et sans pouvoir atteindre mon assiette. » (p. 59)

Une autre relation avec l’espace: « J’en étais séparé par des couches d’espace silencieux. » (p. 59)

Des embarras liés au boulot, qui ne le touchent pas: « C’est drôle; avant, une petite difficulté me privait de sommeil, je souffrai jusqu’à ce qu’elle soit résolue. Maintenant, au milieu de cette sale aventure, j’ai l’esprit tranquille. Les événements qui me concernent se déroulent sans moi, loin de moi, ailleurs. Alors, qu’on ne me dérange pas: je suis bien, je suis heureux. » (p. 62)

Il remarque un changement d’état significatif en ce qui le concerne: « Est-ce que je ne serais pas simplement en train de devenir fou? Je ne dormais pas. Non, je ne dormais pas: j’étais le champ de pommes de terre.
Cela s’est fait tout seul. Je le regardais, et je ne sais plus. Pendant deux ou trois heures j’ai été ce champ de pommes de terre. Voilà. » (p. 63)

Le désir de quitter cet état se mélange avec celui d’y rester: « Ah! je ne suis pas cela; j’aime ma femme, mes enfants, ma maison.
Et malgré moi je pense avec une émotion qui me dégoûte à ces histoires d’assiette, d’ongle, de champ de pomme de terre. Elles m’entraînent; mon cœur bat; j’ai du goût pour ce qui m’arrivera; je souhaite qu’il m’arrive quelque chose, et j’attends; et j’attends ici, malgré tout.
Mais je ne veux pas! Je veux aimer ceux que j’aime et penser comme avant à des choses solides. » (p. 65)

VISa femme savoure son malheur: « Mon mari a une autre femme. La chose se dit comme ça. » (p. 66)

VII
Le voyage de retour. Interruption du voyage.

VIII
« Je ne peux plus vivre. Je croyais, oui, je croyais que j’allais me sauver. Et puis non, non, non! J’ai tout essayé dans le train. Il n’y a rien à faire. Je ne sens plus les miens, je ne sens plus ma vraie vie. Tout m’est étranger. Je suis moins qu’un chien qui a perdu ses maîtres, parce que, malgré tout, le chien reste chien, et en moi il n’y a plus rien de moi-même. J’ai pourtant mon même visage. Mais il ne peut plus rien me dire, plus rien, et j’ai l’impression d’errer à tâtons dans nom corps, dans mon cœur, dans ma tête où la nuit s’est faite d’un seul coup, une nuit aussi épaisse, aussi désolée que cette nuit. » (p. 75)

Dédoublement: « Je peux revoir tout cela, je peux entendre tout cela, je peux faire recouler le sang que nous avons saigné et c’est l’histoire d’un autre, l’histoire d’un autre. Ma mémoire fonctionne à côté de moi, mes souvenirs se tiennent vivants à côté de moi, et moi je reste seul sans pouvoir reconnaître qu’ils sont encore ma vie. J’ai tout perdu. » (p. 77)

En s’addressant à sa femme (absente): « Juliette! Juliette! Est-ce que tu sauras que ce n’est pas une sale histoire de femme qui nous sépare, qui nous brise? C’est une chose affreuse en moi, un mystère, peut-être une maladie encore inconnue. Il ne faut pas tacher ta vie ni la mémoire de mes enfants. » (p. 77-78)

IXLa femme de Jousselin arrive à l’hôtel pour lui faire une scène de jalousie.

Louis regarde sa femme: « Il voit de profil son visage pâle; remontée, la lèvre inférieure plisse le menton un peu gras. Elle est laide. Elle a l’air bête avec son nez qui grossit quand elle est triste, les lunettes décalées qui glissent jusqu’au bout, les yeux déteints ouverts au-dessus, et ses cheveux déroulés. » (p. 82)

Josselin: « On ne sait se parler que pour les choses ordinaires. Celles du fond, on n’a pas l’habitude... » (p. 85)

Ils quittent l’hôtel ensemble.

Deuxième partie
I
« De la fenêtre, je regarde le jardin. C’est mon jardin. Je dis: mon jardin, et cela n’a plus de signification. Qu’est-ce qui est encore à moi? Avant, comme tous les hommes, j’avais mes enfants, mon lit, ma femme, mes vêtements, mon couteau. Chaque minute de l’existence reposait sur des possessions. Maintenant, je regarde en bas de la maison des lapins enfermés dans une cage, et rien que cela suffit à l’étonner. Je n’ai pas plus de lapins à moi que de culotte à moi. Je me dis que tout est à tout, et que je suis tout, que des lapins sont tout, que ma culotte est tout. Je sais bien que ce n’est pas très clair, mais c’est tout de même plus clair en moi et ce me semble beaucoup plus normal que mon ancienne façon de penser. » (p. 92)

Revenu à la maison depuis trois semaines, la femme lui fait chaque jour des scènes de jalousie, parfois devant les enfants: « Pauvre Juliette! Comme si toute la vie était d’entrer dans des femmes, de s’habituer à deux et de gagner des sous! Et même, comme si c’était l’amour profond, les joies de la famille et le cinéma du samedi! Comme si toute la vie n’était que la vie! Ah! je ne pourrai donc jamais t’expliquer! » (p. 93)

Sur l’état exceptionnel de Josselin: « Je me suis allongé sur le lit et cela a commencé presque aussitôt. C’est d’abord un grand silence. Il monte vers moi depuis le bout de mon corps et quand il arrive dans ma tête, je n’ai plus ni tête ni corps. C’est un silence bien plus important que l’absence de bruit, un silence tout à fait bizarre et qui n’a vraiment pas de rapport avec ce qu’on connaît par les oreilles. L’espace est entré aussi dans le silence, et moi je ne suis plus ni chair, ni souvenirs, ni pensées. Je suis devenu rien et je me trouve nulle part avec une joie merveilleuse sans aucune épaisseur, sans aucune limite. Oui, c’est cela surtout qui compte: une joie qui n’est pas une joie d’homme. J’ai disparu; il ne me reste que cette chose ni sang, ni peau, ni cervelle: cette chose tendue à rompre, d’où s’élève une joie de miracle. Quand j’y pense, je me représente l’affaire comme cela: il y a un violon et le violon se met à fondre, à disparaître peu à peu dans l’air. Il ne reste que la plus fine corde et elle s’allonge infiniment. Tant elle s’allonge, on la voit à peine. Elle continue de s’allonger et il en sort une note presque trop aiguë pour qu’on l’entende, qui est plus belle et plus poignante que les plus belles musiques du monde. On voudrait qu’elle s’allonge encore, encore un peu... Mais je sentais que si je laissais cette immense félicité s’accroître encore, j’allais me rompre comme la corde, et je n’ai pas voulu mourir tout de suite de joie. » (p. 94-95)

« La joie. Un vrai coup de poing sur le front. Pas une joie ordinaire. Pas seulement ma joie. La joie du monde entier, si le monde a de la joie, et moi au milieu. » (p. 97)

Mauvaise atmosphère à la maison. La jalousie constante de sa femme.

Comme une crise: « J’ai eu juste le temps de découvrir un banc, de m’y asseoir: un flot de pensées, d’images et de bruits entre dans ma tête, je sens toutes mes forces qui se multiplient, qui se tendent et vibrent comme si j’allais sauter par-dessus les maisons, courir sans appuyer au sol, faire des additions de dix mille chiffres en une seconde, couvrir tout Paris de ma voix, éclater en faisant sauter la ville, et puis je ne vois plus rien, le grand silence monte le long de mes jambes, il m’envahit. Je disparais dans le silence qui est plus que le silence et une joie formidable me remplace. Je ne suis puis, je suis tout ce qui existe, je suis la lumière de ce qui existe. Il n’y a plus rien nulle part qu’une sorte de battement d’ailes dans le ravissement de la joie.
Quand je me suis retrouvé dans mon esprit, quand j’ai eu retrouvé mon corps, j’ai vu les choses avec des yeux changés. Les maisons, le boutique du quincaillier, la terrasse du café, le cinéma, les gens pressés sur le trottoir, tout cela était rétréci, sans consistance, terne, et surtout: inutile. Je ne sais pas si les couleurs ou les formes des hommes, des façades, du ciel ou des arbres se sont modifiées. C’est plutôt comme si j’avais pris soudain, sans m’en apercevoir, beaucoup de recul. Et désormais, il y a une distance, un vide, entre les choses et moi, et il y a aussi, en permanence sur elles, une lumière de commencement du soir. » (p. 103-104)

IILucienne et Juliette commencent à travailler dans une usine. Juliette se donne à un inconnu qu’elle avait rencontré dans le train. Ce n’est pas un coup de foudre, c’est un glissement vers la passion purement sexuelle. Ce n’est même pas de la passion, c’est un acouplement.

III
Un orage.

IVJuliette surprend sa fille « serrée contre un garçon » et la traite de « salope ».
Jacquot est malade.

V
Josselin se sent attiré par une image de Jésus-Christ: « Cependant je l’ai bien regardée, cette image. Je la regarde encore. Aucune autre image ne m’a jamais donné autant de plaisir. Ce n’est pas la couleur, ce n’est pas le dessin, ce n’est peut-être pas même l’histoire qu’elle dit, non, ce n’est rien pour l’œil ni pour le rêve; c’est bien plus riche et plus doux que cela. Maintenant, il me semble que je ne suis plus tout à fait seul, parce que ce Jésus-Christ, ces rayons, ce cœur, ces mains et moi, nous nous comprenons. Il y a entre nous, depuis tout à l’heure, quelque chose comme la fraternité. Si l’on me promenait les yeux fermés à travers cent pays, il y aurait bien un moment où je crierais: « Halte! voici le mien, je reconnais les bruits et l’odeur de ma patrie. » Je regarde l’image; alors, je me sens à l’aise, je me sens rassuré, comme si j’avais enfin trouvé un homme pareil à moi, des voix pour m’annoncer que j’appartiens à une famille. » (p. 128)

Le rejet de la théologie chrétienne telle qu’elle est prêchée à l’église: « Oui, une grande force de bonté, quelque chose, quelqu’un. Depuis des jours je découvre cela: on s’occupe de moi. Au fond, l’image du Jésus-Christ allant au ciel ne fait que me crier ce que je disais tout bas: « Je ne suis pas tout seul, une grandeur s’est mise à vivre au-dessus de ma vie. » Je dis: « une grandeur », parce que je ne sais pas quoi dire. Et, quelquefois, je cherche. Je voudrais bien que ce soit quelqu’un. Je ne sais pas qui, moi: un homme, une femme, saint Nicolas, le Père Noël, la Vierge Marie, une fée. Si je pouvais choisir, ce serait facile. Je lui parlerais, je l’entendrais. Mais non, ces gens-là n’existent pas, évidemment. Et puis, je ne vais tout de même pas me mettre à croire au bon Dieu. Non, non, cette grandeur est bien plus grande; ce qui s’occupe de moi n’a pas de visage, pas de costume, pas d’accent, pas d’histoire. » (p. 129)

Sur les reproches faits par sa femme: « Quand on est sur une haute montagne et que tout en bas deux hommes s’égorgent, on doit croire qu’ils s’amusent. » (p. 130)

Changements physiologiques: « Pourquoi mon cœur bat-il aussi vite? Mes bras, mes hambes, tous mes muscles sont impatients et cependant je n’ai pas envie de bouger. Depuis une semaine, je n’ai guère mangé que de petits morceaux de pain, mais je ne connais plus la faim. Je suis bien, je suis très bien. Je sens de loin mon cœur battre rapidement, tous mes muscles se tendre, frissonner comme les cordes des bateaux à voile quand le vent s’est dressé. » (p. 131)

Jacquot se meurt en criant « Maman me mange! Maman me mange! »

Illumination: « Comment ai-je pu vivre tant d’années jusqu’à cet instant sans le désirer? Ainsi vit-on jour après jour, et chaque jour est une prison de quatre murs et l’on va jusqu’au dernier, passant de cellule en cellule, heureux si quelquefois change la couleur des murs. Et personne ne sait que ce n’est pas le vrai destin, personne ne sait qu’une des cellules peut s’ouvrir soudain par ses quatre murs renversés; et alors il n’y a plus les jours du passé, ni les jours de l’avenir, mais le radieux désert déployé à l’infini, sans droite ni gauche, sans devant ni derrière, sans horizon, la dalle sans fin de tous les murs écroulés, de tous les jours de tous les hommes de la terre, des hommes d’avant, de maintenant, d’après, l’immense désert d’aujourd’hui fait des jours et des jours de l’éternité.
Comment ai-je pu vivre sans savoir? Mais depuis Verdeene, j’attendais, et ce que j’attendais, c’est ce miracle.
Oui, trois fois, quatre fois peut-être, je suis venu au bord de cet instant. La prison s’est entreouverte et refermée et j’ai cru fondre dans le silence, devenir la joie de ce désert d’au-delà des murs. Mais ce n’était rien, presque rien! Et cependant, chaque fois, en même temps que diminuaient les bruits et l’épais bruit de ma vie, un courant de puissance sans limite montait du bas de mon ventre vers mon cœur, touchait mon cœur et se dressait vers ma gorge, comme un serpent qui lentement se déroule en hissant la tête. Alors je quittais mon corps et j’allais me dissoudre dans l’océan de silence, dans l’immobile océan du bonheur tout pur. Mais non, ce n’était rien, presque rien! Le serpent s’est dressé plus haut, il a franchi ma gorge et sa tête est venue se poser une seconde entre mes sourcils, et en cette seconde une lumière magnifique a éclaté derrière mes yeux, une fleur s’est déployée dans mon crâne et les murs sont tombés. J’étais une montagne de sel et je me suis renversé dans la mer, je suis devenu l’eau de la mer, j’ai rejoint ma grandeur. Ah! comment dire? Je ne peux rien me dire de tout ce que je sais. Je voudrais penser, je voudrais m’apprendre mot à mot ce que je sais et chaque parole, chaque idée glisse et retombe, retourne se mêler à tout moi-même, à l’océan.
Tous les bruits, toutes les pensées, tous les gestes, ne demeurent pas ici; ils s’en vont composer le silence qui est fait d’une note vibrante que j’entends, que je ne cesserai jamais plus d’entendre. Je dis cela, et ce n’est pas ce que je sens. Il n’y a pas de parole, ni de pensée, pour contenir cette chose qui contient tout. Mais ce qui m’aide à me faire comprendre, c’est quand je pense à la mer dont le bruit est fait de mille et mille vagues différents, de milliers de galets dissemblables heurtés par des houles jamais les mêmes, mourant et renaissant chacune selon sa courbe et son poids, et qui remplit l’oreille d’un seul souffle qu’on oublie tout de suite. » (p. 137-138)

VI
Juliette se suicide en apprenant la mort de son fils.

VII
La maison avec tout ce qu’elle contient est vendue à un matelassier, qui s’occupe de l’enterrement du fils et de la mère. Lucienne va partir pour Corrèze, chez son oncle maternel.

« Grandeur! Grandeur! Il n’y a plus aucun mystère ni aucune inquiétude. Comme il est doux de n’être plus serré sur soi, de s’étendre loin de son enveloppe et de baigner dans ce bonheur des choses sans hier ni demain! Je ne peux pas me tromper. Ce sont les autres qui sont en dehors de la nature; c’est l’homme que j’étais avant qui était anormal. Mille grandes voix secrètes me font écho, me disent que j’ai raison, me tiennent compagnie dans la justice. » (p. 147)

Josselin s’en va: « Je suis parti droit devant moi, et maintenant me voici au bord de la Seine. Je crois bien que j’ai chanté en marchant. Moi qui ne savais pas chanter, qui ne chantais jamais, je chante. Il pleut. La rive est déserte. Je chante. Je m’en vais. Je marche en sautillant le long de l’eau et je chante.
Je ne retournerai jamais chez moi; et d’ailleurs, je n’ai plus de chez moi. J’ai tout vendu au matelassier, même le lapin, même l’image du Jésus-Christ. Il ne me reste que les vêtements que je porte. Peut-être un peu d’argent dans les poches? Je n’ai pas regardé. Qu’est-ce que cela peut faire?
Je suis tout seul au bord de la Seine. Je serai toujours tout seul. Mais ce n’est pas la solitude. Grandeur! tu n’es pas la solitude!
Ma femme est morte. Mon petit garçon est mort. Ma fille est partie. Ma maison est vendue et je ne travaillerai plus jamais. Alors je chante, et si j’avais encore ma famille, ma maison, mon travail, je chanterais, je marcherais en sautillant au bord de l’eau. Il n’y a aucune différence.
La pluie fait bouillir l’eau de la Seine. Derrière moi, les champs se couchent et se relèvent sans cesse. Et malgré le vent et la pluie, tout repose immobile comme sous le soleil de midi en été.
Qu’est-ce que je vais faire? J’ai envie de me laisser tomber dans l’eau. J’ai envie aussi de marcher longtemps, d’aller vers les pays très chauds, vers les déserts, pour m’asseoir dans la chaleur et la lumière et ne plus jamais bouger.
Il y a bien un homme sur le monde qui peut me dire ce qu’il faut faire quand on a le bonheur que j’ai. Mais peut-être qu’en ce moment même, lui aussi cherche sa place et son destin sur la terre, arrêté comme moi sur une route de banlieue. Et au-dessus de sa tête comme au-dessus de la mienne, passent des troupes d’hirondelles qui s’en vont vers l’Orient. » (p. 156-157)
Encore!

samedi, juin 09, 2007

Le subjonctif

Le subjonctif est employé surtout dans les propositions subordonnées (complétives ou circonstancielles). Il exprime la position de l’utilisateur de la langue par rapport à une action réalisée ou dont la réalisation est incerte, impossible, problématique. C’est un mode de l’incertitude, de la contestation, du doute, de la négation. Le subjonctif confère à la phrase française de l’élègance et de l’expressivité grâce aux nombreuses nuances exprimées.

Le subjonctif est utilisé quand les sujets de la proposition principale et de la proposition subordonnée sont différents. Dans la situation où le sujet est le même, le deuxième verbe est à l’infinitif. Ainsi:

Je veux partir.

Mais:

Je veux que tu partes.

Dans la langue roumaine, on utilise dans les deux cas le subjonctif (conjunctiv).

Dans la langue française, le subjonctif a quatre temps: présent, imparfait, passé et plus-que-parfait.

Les terminaisons du présent sont: - e, -es, -e, -ions, -iez, -ent, ajoutées au radical du verbe (les verbes du IIe groupe après –iss-):

Chanter – que je chante, que tu chantes, qu’il chante, que nous chantions, que vous chantiez, qu’ils chantent
Finir – que je finisse, que tu finisses, qu’il finisse, que nous finissions, que vous finissiez, qu’ils finissent

Voilà la situations qui exigent l’emploi du subjonctif dans la langue française:

I. après les verbes impersonnels ou utilisés d’une manière impersonnelle: il faut, il semble, il arrive, il convient, il suffit:

Il faut que vous fassiez votre devoir.
Il suffit que vous appreniez beaucoup pour réussir.
Il semble que tout le monde soit content des résultats du concours.
Il arrive que l’on ne sache pas ses leçons.
Il convient que vous soyez d’accord avec notre conclusion.

II. après les expressions impersonnelles: il est bon, il est important, il est nécessaire, il est (im)possible, il est indispensable, il vaut mieux etc.

Il est nécessaire que vous fassiez beaucoup d’exercices pour apprendre la grammaire.
Il est indispensable que vous soyez présents à la cérémonie.
Il est bon que vous sachiez ces détails.
Il vaut mieux que vous vous teniez à l’écart de ces choses.

Quelques expressions impersonnelles qui expriment une évidence, une affirmation claire, ne demandent pas le subjonctif: il est évident, il est clair, il est manifeste, il est hors de doute:

Il est évident que cet homme a raison.
Il est hors de doute que vous réussirez.

III. après des locutions conjonctionnelles: afin que, pour que, sans que, avant que, jusqu’à ce que, à moins que, de peur/crainte que etc.

Nous irons au stade sans que Michel sache.
Nous serons de retour avant que papa ne soit rentré.
Je lui expliquerai cette règle jusqu’à ce qu’il comprenne.
Je vous dis tout cela pour que vous soyez prévenu.
Je viendrai sans faute, à moins qu’il ne se mette à neiger.

IV. après des verbes ou des expressions qui transmettent un sentiment:

Je crains que maman ne soit fâchée.
Nous regrettons que vous soyez obligés d’attendre.
Elle est triste que son fils ait échoué au concours.
Il est malheureux que votre frère soit malade.
Je me réjouis que Chantal ait fait un bon début sur scène.

V. après des verbes qui expriment une négation, un doute, un ordre: nier, douter, contester, exiger, défendre, ordonner:

Je nie que ton frère puisse parler de la sorte.
Il conteste que tu aies droit à cet héritage.
Nous doutons qu’il soit capable de faire pareil geste.
Le colonel exige que ses ordres soient respectés.
Je défends qu’on prenne ces mesures à mon insu.

VI. après des verbes qui expriment un désir, une volonté:

Je veux que vous soyez disciplinés.
Elle désire que nous venions la voir.
Je préfère que vous me laissiez tranquille, dit-il.

VII. dans des propositions relatives précédées par une négation, une expression de l’incertitude:

Je n’ai pas de pièce où je puisse travailler tranquillement.
Je cherche une maison qui me convienne du point de vue de la position.

Au cas où la proposition relative est précédée par une certitude, on doit utiliser l’indicatif:

J’ai enfin trouvé une maison où je pourrai travailler tranquillement.

VIII. après des verbes d’opinion à la forme négative ou interrogative exprimant un doute:

Je ne crois pas qu’il consente à l’occuper de cette affaire.
Croyez-vous qu’il puisse arriver à temps au spectacle? Il est parti tard.

Mais:

Croyez-vous qu’il arrivera à temps au spectacle? Il est parti à temps de chez lui.

IX. après les verbes demander, dire, comprendre, entendre, sont possibles et le subjonctif et l’indicatif:

Je demande que vous fassiez vos devoir (ordre).
Je demande à René où il a mis sa serviette (question).
Je comprends que vous voulez me parler, c’est vrai!
Je comprends que vous soyez triste à cause de la maladie de votre femme.
J’entends que tu fais des progrès, je m’en réjouis.
J’entends que tu fasses des progrès en français, puisque tu l’étudies depuis si longtemps.

X. après plusieurs verbes: obtenir, permettre, admettre, accepter, veiller à ce que, tenir à ce que, mériter, s’attendre, supposer, empêcher, souffrir, s’opposer à ce que, concevoir, consentir etc.

J’ai obtenu que Guy fasse son service militaire l’année prochaine.
Le directeur ne permet pas qu’on vienne mal habillé au bureau.
Admettons que vous ayez raison.
Il ne pouvait concevoir que sa conduite pût choquer.
Elle attendit que le docteur eût fini d’examiner sa fille.
Il s’oppose à ce que nous partions aussi vite.

XI. après un superlatif ou une expression équivalente: le seul, l’unique, le premier, le dernier, on peut utiliser aussi l’indicatif, quand l’idée de certitude est clairement exprimée:

C’est le meilleur élève que l’école ait eu.
Ou
C’est le meilleur élève que l’école a eu. – (quand il n’y a pas de doute)

Marc est le seul à qui le film n’ait pas plu / n’a pas plu.
C’est l’unique écrivain que je connaisse / que je connais.
C’est le premier spectacle que j’aie vu cette année / j’ai vu.
Paul est le dernier acteur que nous connaissions / connaissons.

XII. dans la proposition principale:
a) dans le souhait, le désir:

Fasse le ciel que Jacques réussisse.

b) dans l’ordre:

Que tout le monde soit prêt pour le rapport.

c) dans une imprécaution:

Qu’on me laisse tranquille!

d) dans une éventualité:

Qu’il dise ce qu’il a à dire et nous aviserons.

Notes:

1. dans certaines expressions formées avec le subjonctif, “que” est omis:

Puisse-t-il réussir! (numai de-ar reuşi!)
Advienne que pourra! (fie ce-o fi!)
Ne vous déplaise (să nu vă fie cu supărare)

2. dans le langage mathématique, “soit” est utilisé pour exprimer une supposition:

Soit le rectangle...

3. le subjonctif peut exprimer une alternative:

soit André, soit Pierre (ori André, ori Pierre)

4. le verbe savoir au subjonctif présent exprime une affirmation incertaine:

Je ne sache pas que cette affaire ait été conclue
Ou
Cette affaire n’a pas été conclue, que je sache (după câte ştiu)

Le subjonctif a quatre temps: présent, passé, imparfait et plus-que-parfait:

1. Le présent exprime une action simultanée ou postérieure par rapport à l’action principale, quand le verbe de la proposition principale est au présent ou au futur:

Je crains que vous ne compreniez pas ce que je dis.

2. Le passé exprime une action antérieure ou finie, quand le verbe de la proposition principale est au présent ou futur:

Je crains qu’il ne soit pas arrivé à temps à la gare.

3. L’imparfait exprime une action simultanée ou postérieure par rapport à l’action principale, quand le verbe de la proposition principale est au passé:

Les autorités ont pris ces mesures avant que la situation ne s’aggravât par suite des inondations.

4. Le plus-que-parfait exprime une action antérieure par rapport à l’action principale, quand le verbe de la proposition principale est à un temps passé.

Quels qu’eussent été ses succès, le violoniste devait encore parfaire son art.

Ces quatre temps du subjonctif sont utilisés de nos jours uniquement dans le style académique. Dans la langue parlée on utilise seulement:
- le présent, pour exprimer une action ou un état simultané ou futur, indifféramment du temps verbal de la proposition principale:

Elle faisait toujours ce que son père voulait qu’elle fasse.

- passé, quand l’action ou l’état exprimés sont antérieurs, indifféremment du temps de la proposition principale:

Il était mécontent que Denise ait surpris leur conversation.
Encore!