Personnages:
Raymond Courrèges
Paul Courrèges - le père
Lucie Courrèges - la mère
Mme Courrèges - la grand-mère
Madeleine Basque - la sœur
Gaston Basque - le beau-frère
Maria Cross
Thèmes abordés:
- la famille
- l’amour
- la mort
- l’adolescence
- la passion
- la fuite
Résumé:
Avec le roman Le désert de l’amour, écrit en 1925, Mauriac a obtenu le grand prix du roman de l’Académie française. Il s’agit d’un roman où surgissent les grands thèmes de l’amour, de la misère de l’âme sans Divinité, du péché dans lequel sont censés tomber les personnages dont la vie se trouve sous l’empire d’une passion dévorante.
Le désert de l’amour c’était, selon l'auteur, « le roman de mon renoncement. Ce pourrait être le titre de mon œuvre entière. »
La famille Courrèges réunissait Mme Courrèges mère, sa bru Lucie Courrèges - femme frustrée par ses lourdes désillusions sociales, maternelles et amoureuses; le jeune ménage des Basque, avec leurs quatre petites filles - « un îlot de méfiance et de secret »; M. Paul Courrèges - homme faible, sans initiative aucune, qui échoue à son tour dans son rôle d’époux et de père de famille (« Toujours ce fut son martyre de ne rien pouvoir exprimer de ses sentiments ») et finalement Raymond Courrèges auquel sa grand-mère reconnaissait le seul mérite de savoir aimer et se faire aimé par ses nièces, les Basque: « Par exemple, il adore les enfants, on ne peut pas lui refuser ça: il n’y a que les petits qui trouvent grâce devant lui. […] Il n’y a qu’à le voir avec ses nièces pour être sûr que ce n’était pas un mauvais drôle. »
Le fils de la famille Courrèges, Raymond, paraît incapable aux yeux de presque toute la famille. De son côté, le jeune homme éprouve une sorte de mépris mêlé de défi envers ses parents. Mauriac exploite dans son livre le filon de l’enfance malheureuse, thème qu’on retrouve d’ailleurs dans Le sagouin, dans la personne de Guillaume, pauvre enfant malheureux qui n’inspire que dégoût et répulsion à sa propre mère qui le traite d’arriéré, d’enfant dégénéré. Pas avec la même verve adoptée dans Le sagouin, Mauriac a su exploiter le calvaire d’un enfant mal-aimé par sa mère. Raymond était selon Mauriac « la plaie de la famille » : « Ainsi, dès son apparition, naissaient à son propos d’aigres paroles. ». « il faisait peur et horreur à ses maîtres qui séparaient le plus possible des autres ce garçon au visage déchiré (parce que sa chair d’enfant supportait mal le rasoir) ».
A première vue, la chair symbolise le péché, le mal dans les romans de Mauriac. Au fur et à mesure d’une lecture plus assidue on aperçoit chez l’auteur une manière à soi de voir la chair. « Cette chair, il ne faut surtout pas la mépriser. Elle n’est pas l’ennemie dont on m’apprenait quand j'étais enfant à avoir honte et à avoir peur. Telle qu’elle est, elle a été sanctifiée par le Fils de l’Homme qui l’a revêtue et elle est sanctifiée par cette présence de l’âme qui la pénètre, qui est capable de Dieu » (Ce que je crois, 1962)
Mauriac trouve au péché une autre origine: « telle inclination, enfouie dans notre chair avant qu'elle fût née, a grandi comme nous [...] a fleuri brusquement sa monstrueuse fleur, » lit-on dans Le désert de l’amour.
Le péché dans Le désert de l’amour est la boue dans laquelle tombent les personnages à cause de leurs complexes quotidiens, de leurs frustrations, de leur sentiment de défaite continue, en bref, à cause de leur manque de foi, à cause de leur séparation de Dieu. Le péché se traduit dans l’œuvre de Mauriac par un égarement de l’homme ou plutôt par une sorte de fuite afin de s’échapper à l’angoisse quotidienne, au désespoir. Combien de fois le docteur Courrèges n’a-t-il pas essayé de pénétrer le coeur de son fils, combien de fois ne s’est-t-il pas culpabilisé pour la rupture entre lui et son fils: « le pauvre enfant me croit son ennemi [...] c’est ma faute et non la sienne ». Combien de fois l’idée du départ, de la fuite n’est pas venue au jeune Raymond qui voulait s’éloigner de son collège et de sa morne famille. Cette fuite c’était pour l’enfant une occasion pour se cacher, pour oublier la haine de son milieu. Raymond essaye de fuir le monde par un geste irréparable, le suicide, qu’heureusement il ne mène pas à bonne fin: « bien des soirs la mort lui apparut ce qui est le plus simple. [...] Dieu ne voulut pas qu’il en trouvât des balles ». Mauriac exploite avec beaucoup d’ingénuosité cette double obsession de la fuite et de la mort qui hante le jeune Raymond.
Si jusqu’à un moment donné, le père est préocuppé de son fils et essaye de communiquer avec lui et de se rapprocher ce visage de glace, il finit par échouer et ressembler de cette manière aux vrais personnages mauriaciens. Désormais entraîné dans une relation extraconjugale, il oublie son fils et ignore le calvaire du jeune adolescent qui est sur le point de se tuer pour cesser d’être la risée universelle. Le titre de mal-aimé peut être attribué à presque tous les personnages de Mauriac. Si Raymond est accablé de honte et de ridicule à cause de l’image que les autres lui imposent, on verra son père connaître l’angoisse générée par la passion envers Maria Cross et aussi sa mère, femme qui est mal-aimée par son époux: « elle fit le geste d’incliner la tête sur l’épaule de son mari, devina son corps rétracté, cette figure close ».
Dans Le désert de l’amour, comme dans la plupart des romans de Mauriac, le personnage principal est une femme, Maria Cross. On a dit qu’elle illustrait le mythe de Phèdre, frequemment répandu dans l’œuvre romanesque de Mauriac car elle se montre comme une femme plutôt agée, amoureuse du jeune Raymond qui pourrait passer pour son fils. Dans ce roman la rivalité dont Maria Cross est l’objet se joue entre un père et son fils. Le ménage à trois du mythe Hippolyte – Phèdre – Thésée est repris par Raymond – Maria Cross – docteur Courrèges.
Le docteur aime en secret Maria Cross - maîtresse entretenue par Victor Larousselle - qui tombe à son tour amoureuse d’un jeune adolescent qui s’avère être le fils de son docteur. Maria Cross aime en Raymond l’image de son fils, le petit François qui est mort à cause d’une méningite. Le roman commence par la fin du fil historique quand déjà la triade a changé. Après une dizaine d’années, Maria Cross entre dans un bar à Paris ou elle va rencontrer par hasard Raymond. Elle n’est plus amoureuse de lui, elle est désormais mariée avec son ancien amant, Victor Larousselle ( « elle souriat dans le vague, indifférente à la présence de Raymond, toute occupée d’il ne savait quelle passion » ). Mais la triade primordiale ne se déchire pas, car Maria Cross devient par ce mariage belle-mère du jeune Bertrand, ancien camarade de Raymond et qui va prendre sa place dans cette triade amoureuse car: « ce nom de Bertrand, il suffit que Maria le prononce pour être détendue, appaisée, attendrie. » Le côté dramatique de l’œuvre de Mauriac est provoqué par cette rupture entre l’amour maternel de Maria Cross pour son feu fils et l’amour charnel, la passion qui salit l’être humain.
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