samedi, mai 31, 2008

Le logorallye

Le logorallye consiste à écrire en introduisant dans le texte les mots d’une liste établie. L’ancêtre du jeu est le bout-rimé, dont l’inventeur fut sans doute Louis de Neufgermain dans deux recueils (1630, 1637), et que le poète Dulot mit à la mode au milieu du XVIIIe siècle.

Saint-Simon rapporte que le poète Dangeau fut défié par Louis XIV, contre promesse d’un logement. Le roi, ayant lancé des « rimes sauvages » (selon Saint-Simon) à Dangeau, celui-ci répliqua par un poème, et obtint le logis sur-le-champ.

Au XIXe siècle, Alexandre Dumas organisa un concours et publia un recueil des œuvres des vainqueurs.

Aujours’hui, seuls les chansonniers s’y risquent encore.

Le logorallye de prose attire davantage les auteurs. Dans ses Exercices de style, Raymond Queneau en écrivit un avec les mots suivants à caser dans l’ordre: « dot », « baïonnette », « ennemi », « chapelle », « atmosphère », « Bastille », « correspondance ». En voici le début:

Un jour, je me trouvai sur la plate-forme d’un autobus qui devait sans doute faire partie de la dot de la fille de M. Mariage, qui présida aux destinées de la T.C.R.P. Il y avait là un jeune homme assez ridicule, non parce qu’il ne portait pas de baïonnette, mais parce qu’il...

Une variante consiste à extraire la liste des mots imposés d’une page d’auteur. On peut aussi jouer à plusieurs et tirer les mots au hasard et aux dés. Le peintre C. Zeimert, en tout cas, suggère à ses préfacier d’emprunter un itinéraire obligatoire pour leur écrits sur lui.

Plus largement, Queneau répéta non pas quelques mots, mais les mêmes éléments narratifs dans les quatre-vingt-dix-neuf Exercices de style. Il s’en servait pour briser la langue de bois, alors que la langue de bois est souvent l’effet pervers du logorallye, qui consiste à disséminer dans le discours un certain nombre de « mots/idées » au politique, ou de citations appropriées sur le parcours d’une thèse universitaire.



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